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La revue de l'AFL

Les Actes de Lecture   n°10  mars 1985

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note de lecture

Si certains chapitres sont contestables l’ensemble devrait être apprécié par tous ceux qui désirent approfondir leurs recherches ou leur réflexion sur la lecture.


PRATIQUES DE LA LECTURE

Sous la direction de Roger Chatrier

Éditions Rivages 1985


Apprendre à lire et à bien lire, c’est­-à-dire devenir apte à s’ouvrir à des textes nouveaux sans se soucier en même temps de conformer la compréhension qu’on en construit à celle qui est communément reçue le groupe social détenteur des pratiques du livre, peut être inconfortable pour l’autodidacte. P. BOURDIEU a souligné le caractère “illégitime” et donc négativement connoté de ces percées individuelles dans le monde de la culture savante”...

… « Quelques hypothèses... Lire c’est se lire et se donner à lire - En d’autres termes, que donner un sens, c’est se parler dans ce qui peut-être ne parvient pas à se dire ailleurs plus clairement...

À chaque lecture, le déjà lu change de sens, devient autre. C’est là une forme de

L’échange »...

Deux passages immédiats ; on peut bien entendu, approuver, contester, applaudir, rejeter..., cependant, ils font partie d’un ouvrage qui apporte une contribution supplémentaire à la réflexion sur la lecture, prise non en tant que pratique scolaire mais pratique culturelle, ayant des supports historiques, sociologiques, littéraires...

En outre, on rentre tout à fait dans la problématique soulevée au cours de l’université d’été (Nantes - 1984) à savoir celle des “exclus de la lecture”, avec des contributions permettant des éclairages complémentaires et différents.

Complémentaires par des éclaircissements sur des pratiques de lecture et de l’écrit aux XVIIIème,

XIXème, XXème siècles (la Bibliothèque Bleue, les lieux publics de lecture, les salons...) en rappelant des éléments parfois oubliés (comme ceux que l’on trouve “Lire et Ecrire” de Furet et Ozouf) ou des éléments historiques se rapportant à des pratiques sociales de la lecture et de l’écrit et que l’on trouve dans les excellents chapitres de Daniel Roche et Daniel Fabre, à savoir les pratiques de l’écrit dans les villes françaises du XVIIIème et/ou les liseurs dans les ­sociétés pyrénéennes aux XIX et XX~me siècles.

Différents par les analyses de l’acte de lire à travers la littérature : Rousseau définissant implicitement ou explicitement ce “quelqu’un”(individu) s’appropriant l’imprimé vers la fin du XVIIIème siècle.

À travers la littérature, mais aussi à travers la peinture. “La Lecture”... Autant de titres de tableaux ­définissant non seulement des attitudes mais également, à travers ces attitudes, le regard d’une société sur ces “lecteurs” intimistes, passionnés, occasionnels...

Si certains chapitres sont contestables l’ensemble devrait être apprécié par tous ceux qui désirent approfondir leurs recherches ou leur réflexion sur la lecture.


Peut-être est-il bon de rappeler ­pourquoi le sujet du livre avait paru important. L’idée au départ était double : d’une part, il est clair que pour de nombreuses approches en sciences sociales ou en critique textuelle, le problème de la lecture est un problème central. Et, d’autre part, il est non moins clair que les manières d’approcher ce problème sont restées long­temps cloisonnées et que très peu de dia­logues se sont instaurés entre sociologues et psychologues, sociologues et historiens ou historiens de la littérature.

L’idée de départ de cette rencontre était donc de mêler, de creuser si c’était possible. les approches menées en termes de critique littéraire et en termes historiques. Il semble aussi que pour débattre de la compréhension possible des pratiques culturelles, l’exemple de la lecture est un très bon exemple puisque sur ce terrain se trouvaient posés comme dans un microcosme, les problèmes que l’on peut rencontrer dans d’autres champs et avec d’autres pratiques”...


En outre, comme il s’agit d’interventions diffé­rentes, la lecture peut être à la fois sélective, approfondie, partielle, indépendante... Les références utilisées rendent l’accès aux écrits un peu difficile mais jamais inaccessible ! (Je renverrai volontiers à des documents utilisés lors de l’université d’été de Nantes tels que : Histoire de l’édition Française : livres bleus et lectures populaires (R. Chartier). De nouvelles pratiques de Lecture (F. Parent), Sociologie de la culture et sociologie des cultures populaires (C. Crignon et J-C Passeron), Presse du coeur (Actes de Lecture n°6).

Ce livre permet de percuter le présent par l’analyse des pratiques sociales d’hier, de percuter le présent par l’analyse des pratiques sociales d’aujour­d’hui. Au-delà du contenu abordé, regardons les photos parues dans les Actes de Lecture, photos couchées sur du papier, mais vivantes dans la réalité sociale.... Ces photographies que nous percevons tous les jours nous interrompent dans notre vision subjective du monde. Cela fait partie, qu’on le veuille ou non, des nouvelles pratiques de la lecture, dont nous sommes aussi les acteurs.

Finissons sur une phrase de P. BOURDIEU. « Affirmation et questionnement ».

Dans une civilisation de lecteurs, il reste énormément de pré-savoirs qui ne se véhiculent pas par la lecture, mais qui, pourtant, l’orientent”.


Philippe WUCHNER


Instituteur à Villers-Cotterêt.

Groupe local AFL Picardie.