Les actes de lecture n°56 décembre 1996
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...DE
FORMATEUR.
S'interroge-t-on sur l'autonomie individuelle quand le collectif se déchire ? |
FORMATEL, dix ans après... Existe-t-il toujours des terrains vagues ou faut-il suspecter l'individualisation ? Avant de commencer, chers lecteurs, il conviendrait d'éclaircir qui vous êtes ! Un vétéran des préfos jeunes ? Un SIVP issu d'un DIJEN ? Impossible ! Vous êtes dépisté... À votre oeil qui pétille (encore), on reconnaît en vous un de ces extraordinaires PAQUE ! Peut-être souhaiteriez-vous poursuivre une trajectoire brutalement interrompue ? Qu'à cela ne tienne ! Pour le même prix, ou presque, vous deviendrez un CRIF sur le plateau mob.. Votre âge ? Limite ! La jeunesse s'arrête à 26 ans. Mais si vous insistez, rien ne vous empêche de rejoindre rapidement un de ces merveilleux modules PCB... Au stade de notre récit, vous avez certainement compris pourquoi, à FORMATEL, depuis dix ans, nous privilégions la transversalité. Nous avons choisi, en quelque sorte, d'être comme le métro par rapport à la Grande Arche... Mais votre regard vacille. Le monde, et surtout celui de la formation, abusivement appelée continue, est plein de signes et de sigles abscons et cruels sur lesquels l'intelligence s'épuise. Votre cas n'est peut-être pas si grave... n'auriez-vous pas simplement besoin d'une RAN ? 1984-1985... Dans une dynamique d'expansion sinon de recherche, apparaissait
au sein de la formation pour jeunes sortis du système scolaire,
une nouvelle action de formation : les APP (Ateliers Pédagogiques
Personnalisés). DéjA vieille vague outre-Atlantique,
les APP avaient séduit jusqu'à l'Education nationale qui
lançait, elle aussi, ses premiers Centres de Ressources.
Collectivement, analphabètes et illettrés, toutes différences confondues, nous avons défini nos projets, inventorié nos besoins, laissé aussi s'exprimer nos désirs. Notre champ d'action, nous l'avons déterminé sans grande hésitation, il s'imposait à tous : ce serait l'écrit... Comment on s'y engouffre, comment et pourquoi on y prend des appuis et quelles modifications il entraîne chez celui qui l'utilise - qu'il en soit lecteur ou producteur. Mettre l'écrit à la disposition de ceux qui en sont exclus, de ceux qui l'utilisent contraints et forcés, de ceux qui n'ont pas fini de comprendre comment ils pouvaient s'en servir, de ceux qui ont compris quel pouvoir il donne et rêvent d'agir... Produire des outils pour entrer dans l'écrit suppose que l'on
cerne de plus en plus finement ce qu'il est, à quoi il sert, comment
il fonctionne. Notre réflexion s'enracine forcément dans
les recherches d'autres - linguistes, psycholinguistes, sociologues et
pédagogues. Nous explorons les mêmes champs, essayons de définir
le même objet. Car comment guider quelqu'un dans son apprentissage
d'un processus global et complexe, si on n'en a soi-même qu'une représentation
brumeuse et fragmentaire ?
Les outils créés par l'équipe de l'APP s'inscrivent donc dans la problématique plus générale qui vient d'être exposée : guides de lecture, fiches d'orthographe/grammaire, parcours d'expression écrite, d'étude des mathématiques. Tous ces outils ont en commun de faire découvrir l'écrit dans sa complexité et son authenticité. - Les fichiers d'orthographe font travailler les stagiaires sur
des corpus de textes et non à partir de phrases exemples choisies
pour leur confort : ces corpus permettent d'être confronté
à la langue telle qu'elle fonctionne dans ses aspects à la
fois systématiques et variables et d'avoir avec les apprenants de
véritables échanges sur ses "subtilités" et son efficacité.
Pas d'apprentissage de la lecture possible sans écriture : nous
sommes loin du décodage de successions de phonèmes, pratique
encore courante dans la formation des Bas Niveaux de Qualification ! La
forme écrite ne peut se fixer qu'en la reproduisant dans sa forme
première, c'est-à-dire avant tout comme une succession de
signes pour l'oeil, formes proches ou différentes et sèmes
pour la mémoire...
Toute recherche pose inévitablement la question de son évaluation.
Dans un contexte de formation, évaluer, c'est mesurer les effets
d'une action de formation au travers d'un écart entre un état
initial et un état final. Cet écart constituant "l'effet
formation".
Nous optons donc, faute de mieux, pour une évaluation qui centre son observation non sur la personne mais sur ce qu'elle produit (en l'occurrence, du sens à travers de l'écrit) et nous essayons que cette évaluation soit double et réciproque : le formé évalue le support que lui propose le formateur, et le formateur évalue ce que produit le formé. Chacun s'expliquant sur ses choix, sur ses stratégies et échangeant dans une dynamique de recherche et de transformation. L'objet produit des deux côtés n'est qu'un état transitoire de l'avancée de chacun, qui ne fige les échecs ni de l'apprenant, ni du formateur. Michèle SARBOURG |