La revue de l'AFL
Les
actes de lecture n°63
septembre 1998
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Arguments contre la conscience phonémique
L'article qui suit de Robert Scholes, PhD, professeur de
communication orale et de linguistique A l'Université de
Floride, s'insère dans notre rubrique Bonnes Pages
composée de textes et de documents d'origines diverses qui,
A propos de la lecture et de l'écriture et de leurs
apprentissages, ont un intérêt documentaire et informatif
certain parce qu'ils présentent des recherches et des
expériences ou des pratiques peu connues ou parce qu'ils
abordent des sujets pas ou peu traités dans notre revue ou
encore parce qu'ils exposent une réflexion, une position, un
point de vue originaux.
(Nous remercions le Professeur Scholes de son aimable autorisation de
reproduire son article dont la version anglaise a été
diffusée par Internet (http://www.class.ufl.edu/users/rscholes/psatext2.htm).
Ces dernières années, on a accordé beaucoup
d'intérêt A l'étude de la conscience
phonologique ainsi qu'A son rôle dans l'acquisition et
l'utilisation des savoir-faire en lecture. Les savants sont
divisés quant A la relation entre la conscience
phonologique et la lecture ; quelques spécialistes soutiennent
que la capacité d'analyser le discours en segments phoniques
discrets est un signe précurseur - et même un facteur de
réussite dans l'acquisition de la lecture, d'autres
prétendent qu'elle résulte de l'habitude A
considérer le langage comme un système d'écriture
alphabétique.
Cet article présentera des preuves et des arguments montrant que
la conscience phonologique a très peu de choses A voir,
sinon rien, avec la lecture ou son apprentissage.
Avant de procéder A une évaluation du rôle
de la conscience phonologique dans la lecture, il est nécessaire
de partager une compréhension commune des termes employés
- en particulier, la lecture et la conscience phonologique.
DÉFINITION 1 : LA LECTURE
Un néophyte serait certainement surpris d'apprendre que les
chercheurs qui se spécialisent dans l'étude de la lecture
ne partagent pas la même définition de ce concept mais
c'est pourtant le cas. Quelques spécialistes définissent
la lecture comme la capacité A oraliser des séries
de lettres (y compris des séries qui n'ont aucun sens) ;
d'autres se conforment A la notion plus commune selon laquelle
la lecture implique la compréhension. Sally Shaywitz (Shaywitz,
1996) représente parfaitement ceux dont l'opinion est que la
lecture est une activité de conversion grapho-phonologique (elle
va encore plus loin en disant que l'oral et l'écrit sont tous
deux « phonémiques »). Elle définit les
troubles de la lecture, la dyslexie, comme « un déficit A l'intérieur du système du langage au niveau du module phonologique » qui « diminue la capacité [d'un enfant] A segmenter le mot écrit en ses composants phonologiques sous-jacents »
(p. 100) et se conforme A l'égalité
Bloomfieldienne (Bloomfield, 1927) entre l'écriture et la parole
lorsqu'elle déclare, que « les phonèmes, ... fabriquent tous les mots écrits et parlés.
» (p.98). Après cette définition de
l'écriture comme étant de l'oral écrit, Shaywitz
est amenée A dire « avant que les mots puissent
être identifiés, compris, ... ils doivent être
décomposés en leurs unités phonémiques. » (p.99)
Cependant, pour la plupart des gens, la lecture fait
référence A la compréhension du langage
écrit. L'homme de la rue, si on lui demandait s'il sait lire ani rotzeh lishtot tapuzim,
répondrait sûrement, s'il ne connaît pas
l'hébreu : « Non ». Ou bien il pourrait
répondre : « Je peux le prononcer, mais je ne sais pas ce
que cela signifie » - indiquant clairement la
compréhension de la différence entre lire et oraliser.
Cette notion de la lecture, pleine de « bon sens », est la
définition de la lecture qui sera utilisée ici. Ce n'est
pas seulement l'acception ordinaire du mot, mais aussi celle de
spécialistes comme David Olson (Olson, 1977), Frank Smith
(Smith, 1986), John Carroll (Carroll, 1972) et de nombreux autres.
Plus formellement, voici la définition des termes
écriture et lecture tels qu'ils sont employés dans
l'exposé qui suit :
L'écriture est une représentation graphique de constructions linguistiques.
Si une représentation graphique peut être comprise sans
avoir connaissance d'un langage spécifique, cette
représentation n'est pas de l'écrit, c'est un dessin.
Les entités linguistiques représentées dans
l'écriture sont des constructions qui se rapportent au sens ou
A la fonction, telles que le mot et le morphème. Voir
Ranko Bugarski (Bugarski, 1970 ; 1993) pour davantage de détails
sur ce point - plus particulièrement, au sujet de l'observation
selon laquelle, dans sa représentation des constructions
linguistiques, un système d'écriture peut être
considéré comme une grammaire descriptive du langage
qu'il encode.
La lecture est la conversion des constructions linguistiques écrites en sens.
En gardant A l'esprit ce sens du mot lecture, nous pouvons
considérer des phénomènes comme la « lecture
silencieuse » (de peu d'intérêt pour ceux qui
considèrent que la lecture est une oralisation), et nous pouvons
concentrer notre attention sur la recherche concernant les
étapes et les processus par lesquels les enfants
acquièrent la capacité de construire du sens A
partir du texte ( d'aussi peu d'intérêt dans la
théorie de l'oralisation).
DÉFINITION 2 : LA CONSCIENCE PHONOLOGIQUE
Il y a deux capacités très différentes connues
sous le nom de conscience phonologique. L'une d'elles est la
capacité d'isoler et d'oraliser des segments syllabiques du
langage oral. Les unités syllabiques incluent les voyelles (V)
et les combinaisons consonne-voyelle (CV, VC, CVC). Cette
capacité pourrait être appelée Conscience Syllabique.
L'autre est la capacité d'isoler et de manipuler des
phonèmes segmentaux (sub-syllabiques). Cette capacité est
souvent appelée Conscience Phonémique. Il serait plus adéquat de l'appeler Conscience Phonétique
car les phonèmes sont des constructions abstraites de la
description linguistique et ne sont pas nécessairement audibles
(Sapir, 1949). En général, les études concernent
la manipulation de segments acoustiquement déterminés et
pas la capacité des gens A conceptualiser la parole en
terme de construction rationnelle. C'est A dire qu'on leur
demande d'enlever le son [p] de "spin", mais qu'on ne leur demande pas
de montrer qu'ils sont conscients de ce que le son [p] après -s
est un allophone du phonème /p/ (même s'il sonne comme
[b]) ; ou qu'on leur demande d'ajouter le son [k] A 'it', mais
pas s'ils sont conscients que les sons [k] très distincts dans
'key', 'cup' et 'cop' sont tous allophones du phonème [k]. Pour
éviter cette confusion terminologique, nous ferons
référence A cette capacité de manipuler ces
segments isolés de la parole en utilisant le terme Conscience du Segment Phonétique, ou CSP.
Bien qu'il existe de bonnes raisons de faire la différence entre
la conscience syllabique et la conscience du segment phonétique,
cette distinction n'aura aucune incidence sur les arguments
présentés ici. Cependant, il peut être
intéressant d'indiquer pourquoi la distinction est
généralement vaine dans le contexte de la «
conscience phonémique ». Un des tests les plus courants
nécessite la présence d'un expérimentateur qui
présente oralement un mot (quelquefois ce mot n'a aucun sens) et
une consonne occlusive et demande au sujet quel résultat on
obtient si la consonne est supprimée du mot - par exemple,
qu'obtenez-vous si vous enlevez [p] de «plot »? Le
problème avec cette façon de procéder est que les
consonnes occlusives ne peuvent pas être articulées
isolément. Une occlusive sourde signifie simplement qu'il n'y a
aucun son, et dans le cas d'une occlusive sonore, il y a seulement un
murmure très bref. Quand les sons du mot "cat"(chat) sont
prononcés séparément, ce qui est
nécessairement articulé est une suite de trois syllabes,
A savoir [k] [ae] [t] . En conséquence, une grande partie
de la recherche sur « la disparition du phonème » ne
peut pas être distinguée des études sur la
manipulation des syllabes. (Il existe une façon de surmonter ce
problème, au moins chez des sujets adultes, et nous allons la
présenter ci-dessous).
LECTURE ET CONSCIENCE PHONOLOGIQUE : LE DÉBAT ACTUEL
Les relations entre la lecture et la conscience phonologique ont
longuement été débattues en termes de dichotomie
impliquant la causalité : par exemple, qu'est-ce qui cause quoi
? Les deux aspects de ce débat sont :
1) La conscience phonologique précède le
savoir-faire en lecture et contribue A la réussite de
l'apprentissage de la lecture.
On retrouve cette idée novatrice par exemple dans les travaux de
Tumner et de ses collègues (Tumner, Pratt et Harriman, 1984) et
chez d'autres utilisant une épreuve de segmentation
phonémique, où après avoir reçu une
brève formation, on demande A des enfants de taper dans
leurs mains le nombre de segments phonétiques dans un mot
stimulus. Malgré des doutes concernant ce qui est exactement
évalué (du fait que les phonèmes ne peuvent pas
être physiquement isolés au fil du discours) Marilyn Adams
(Adams, 1990) conclut que « ...
la conscience phonémique évaluée par les
épreuves de segmentation semble être A l'origine
d'une compétence précoce en lecture... » (p.70).
2) La conscience phonologique est une conséquence de la maîtrise de l'écriture alphabétique.
Parmi les partisans de cette idée, on trouve Dale,
Crain-Thoreson, et Robinson (1995) dont les études sur la
capacité de lecture chez les enfants précoces sur le plan
linguistique, disent-ils, « ont
fortement conforté l'opinion selon laquelle la conscience
phonémique est en grande partie le résultat de
l'apprentissage de la lecture même A un âge
avancé. » (p. 180-1). La critique de leurs propres
recherches ainsi que de recherches similaires les amène A
la conclusion que, « ... les savoir-faire en conscience
phonémique, ... ne se développent
généralement qu'en réponse A une
expérience de l'alphabétisation que celle-ci ait eu lieu
A l'école ou A la maison... » (p.183).
On trouve d'autres déclarations en faveur de l'idée de la
conséquence dans les travaux d'Ignatius Mattingly et Bruce
Derwing. Mattingly (1994), parlant des inventeurs grecs de l'alphabet
occidental, déclare, « Il
est sans aucun doute vrai que ces linguistes, comme la plupart des
occidentaux cultivés, ont basé leur notion de segment
phonémique sur la découverte d'une orthographe
alphabétique. Ainsi, la conscience des segments est apparue chez
les grecs pour la même raison qu'elle est apparue chez tous leurs
successeurs : en tant que résultat de la découverte de ce
qui s'est révélé être un système
d'écriture segmenté. Il n'y a pas besoin de supposer
qu'il existe chez n'importe qui une conscience segmentale
antérieure, basée sur l'orthographe plutôt que sur
la phonologie. » (p. 89). Derwing (Derwing, 1992) affirme de
façon convaincante que la phonologie des gens qui savent lire,
écrire et parler est lourdement influencée par leur
expérience orthographique et que la lecture et l'écriture
ne peuvent pas être réduites A de simples parasites
de la parole et de l'écoute.
Cette opposition entre les deux points de vue est très joliment
illustrée par les écrits de Marilyn J. Adams (Adams,
1990). Adams déclare (1990, p.306) que, « Assurément,
notre système d'écriture alphabétique ne nous a
pas amenés A inventer des phonèmes. Au contraire,
c'est leur réalité psychologique antérieure qui
nous a permis d'inventer l'alphabet.» Et, sur la même page, «
La syllabe est psychologiquement analysable en phonèmes, et
cette chose est évidente pour nous parce que (et peut-être
seulement parce que) nous avons appris un système
d'écriture alphabétique. » [ italiques par l'auteur].
Il existe une troisième position sur la conscience phonologique
et la lecture qui pourrait être résumée ainsi:
3) La conscience phonologique et le savoir-faire en
lecture n'ont aucun lien, ce sont des capacités
indépendantes.
Ce point de vue pourrait être celui avancé par des
lecteurs de systèmes d'écriture non-alphabétique
(comme les Chinois) et pourrait s'appliquer A un
phonéticien expérimenté et dans une certaine
mesure (voir ci-dessous) A des lecteurs de systèmes
d'écriture alphabétique.
LA CONSCIENCE PHONÉTIQUE ET L'ALPHABÉTISATION CHEZ LES ADULTES
De nombreuses études ont montré que les adultes non
alphabétisés parlant leur langue maternelle ne sont pas
capables de réaliser des épreuves étudiant la
conscience du segment phonétique (habituellement la suppression
de phonèmes) alors que les lecteurs de systèmes
d'écriture alphabétique - dès le CE1 - sont
capables d'effectuer de telles tâches. Bertelsen et de Gelder
(1989), par exemple, présentent nombre d'études de sujets
parlant le portugais, le belge, le japonais et le chinois qui
démontrent l'absence de conscience du segment phonétique
chez les adultes non-lecteurs ou lecteurs de systèmes
d'écriture non-alphabétique, de même que sa
présence chez des personnes qui ont appris A lire des
systèmes d'écriture alphabétique A
l'âge adulte. Scholes et Willis (1987 ; 1991) justifient
l'absence de conscience du segment phonétique chez les
non-lecteurs de langue maternelle anglaise de même que sa
présence chez les enfants de CE1 qui réussissent leur
apprentissage de la lecture.
De tels travaux démontrent clairement que la conscience du
segment phonétique n'est pas un composant naturel de la
conscience linguistique orale. Étant donné ce
résultat, il s'ensuit que la conscience du segment
phonétique n'est pas présente chez l'enfant
pré-lecteur et donc, ne peut pas être
considérée comme un signe précurseur de la
réussite en lecture. Ces travaux ne disent pas, bien sûr,
si la pratique de la conscience du segment phonétique pourrait
ou non aider un enfant A apprendre A lire : cette
question sera traitée ci-dessous.
Il est particulièrement instructif d'étudier la
conscience du segment phonétique chez les adultes
alphabétisés. Quand on demande aux anglophones adultes
alphabétisés de réaliser des épreuves
phonologiques, leurs réponses démontrent
généralement qu'ils conceptualisent le discours en termes
de forme écrite. Plusieurs chercheurs (Ehri et Wilce, 1986 ;
Derwing, 1992 ; Scholes, 1993) ont montré cela de
différentes manières. Des sujets utilisent une
procédure basée sur l'orthographe en comptant les sons,
par exemple, et jugent que des mots comme 'tempt' et 'limped' ont plus
de sons que 'tent' et 'lint' ; que 'ditch' a plus de sons que 'rich',
etc. Lorsqu'on leur demande de supprimer des sons, ils trouvent moins
difficile le fait de supprimer le [t] de 'witch' (='wish') que de
'which' (= 'wish'). (1)
Lors d'une récente étude, j'ai demandé A
des étudiants d'université (N=70) de supprimer des sons
dans des mots et de rapporter les résultats par écrit.
Pendant cette expérience, j'ai évité que les
sujets se trouvent dans l'incapacité d'articuler des consonnes
occlusives isolées en leur demandant d'enlever le Nième
son (par exemple, le premier son, le deuxième son, ou le
troisième son, etc.). Un essai se présentait sous la
forme suivante : Quel mot obtenez-vous si vous supprimez le
Nième son du mot X ; par exemple, Quel mot obtenez-vous si vous
supprimez le 2ème son du mot 'frame' ? Dans quelques-uns des
essais, le son A supprimer entretient une relation univoque avec
une lettre dans l'orthographe du mot. Les sujets ont très bien
réussi ces stimuli (Tableau 1, Série 1). Dans d'autres
cas, le son A supprimer ne correspond pas A une lettre
dans l'orthographe des mots. Les sujets n'ont pas très bien
réussi ces stimuli (Tableau 1, Série II).
Tableau 1
Pourcentage de réponses correctes dans une tâche de suppression de phonèmes
70 réponses pour chaque stimulus
Série 1 : Le son = la lettre 90%
Supprimer 1er son de 'grow' ([gro] - [g] - [ro], 'row') 93%
Supprimer le 2ème son de 'frame' ([frem] - [r] = [fem] 'fame') 97%
Supprimer le 1er son de 'stable' ([stebl] -[s] = [tebl] 'table') 83%
Supprimer le 4ème son de 'stable' ([stebl) -[b] = [stel] 'stale') 86%
Série II : Le Son n'est pas la lettre 12%
Supprimer le 4ème son de 'placed' ([plest] - [s] = [plet] 'plate') 16%
Supprimer le 3ème son de 'faxed' ([faekst] - [k] = [faest] 'fast') 11%
Supprimer le 4ème son de 'faxed' ([faekst] - [s] = [fekt] 'fact') 6%
Supprimer le 3ème son de 'liked' ([laiikt] - [k] = [lait] 'light') 19%
Si la conscience du segment phonétique précédait
ou était indépendante de la maîtrise de
l'écriture alphabétique, les exemples de la série
II ne devraient pas être plus difficiles que ceux de la
série I. Or ils le sont de façon significative. Qui plus
est, ces études montrent que la conscience du segment
phonétique est une conséquence très limitée
de la maîtrise du système alphabétique dans la
mesure où les gens qui sont alphabétisés sont
conscients des segments phonétiques seulement quand ces segments
ont une correspondance univoque avec les lettres écrites.
Autrement dit, quand on demande A des personnes de
réaliser des analyses phonétiques, elles font en
réalité des analyses de lettres, - les résultats
démontreront apparemment la conscience du segment
phonétique alors qu'en fait ils démontrent seulement la
conscience des lettres. Ainsi, lorsqu'on demande de supprimer le [k]
(ou troisième son) de 'liked', on obtient 'lied' (suppression de
la lettre) plus souvent que 'light' (suppression du son) (dans
l'étude qui figure dans le Tableau 1, 'light' était la
réponse de 19 % des sujets).
Il faut noter ici que la capacité de détecter la rime
n'est pas une bonne mesure de la conscience du segment
phonétique. Les sujets auxquels Scholes et Willis (1978) font
référence ont fait la preuve qu'ils étaient
capables de distinguer des syllabes sur la base de différences
phonétiques relativement subtiles, mais n'étaient pas
capables d'isoler les segments phonétiques impliqués dans
la distinction. Ils pouvaient, par exemple, distinguer 'flagrant' de
'fragrant' dans un test de paires minimales, mais ne pouvaient pas
supprimer le [r] de 'grow'. Il n'en résulte donc pas que,
quelqu'un qui peut identifier les rimes peut isoler le ou les
segment(s) phonétique(s) qui composent la rime.
On doit également remarquer que la conscience syllabique, aussi
opposée qu'elle soit A la capacité d'isoler et de
manipuler des phonèmes segmentaux, paraît appartenir
A la conscience linguistique de tous ceux qui parlent. (Peters,
1985). On pourrait s'attendre A cela en partant du raisonnement
selon lequel les syllabes existent acoustiquement A l'inverse
des phonèmes.
CONSCIENCE PHONOLOGIQUE ET ACQUISITION DE LA LECTURE
Alors qu'il est tout A fait clair que la conscience phonologique
est un résultat très limité de l'acquisition de
l'alphabétisation, on pourra toujours affirmer que
l'enseignement de la conscience phonologique facilite l'apprentissage
de la lecture. Bertelsen et de Gelder (1989), par exemple, remarquent
qu'on pourrait concevoir que la lecture phonologique soit importante
voire nécessaire A une certaine étape de
l'apprentissage de la lecture. En revanche, il est sûr que la
conscience phonologique n'est pas requise pour savoir lire et
écrire. Eric Lenneberg (Lenneberg, 1962) a rapporté le
cas d'une personne incapable de parler depuis la naissance (dysarthrie
congénitale) et d'individus atteints de graves
déficiences auditives congénitales qui ont atteint un
assez bon niveau en lecture et en écriture (voir, aussi,
Campbell et Butterworth, 1985). Bien que les savoir-faire en lecture
des sourds soient habituellement faibles (en moyenne le niveau de
lecture du CE1 pour les lycéens), ceci est le résultat
d'une limitation générale concernant l'acquisition du
langage plutôt qu'une déficience de lecture en soi.
(Scholey, Cohen et Brumfield,1978 ; Russell, Quigley, et Power, 1976).
En ce qui concerne les enfants normaux, cependant, il y a de nombreuses
affirmations selon lesquelles la conscience phonologique est
liée de façon positive A l'apprentissage de la
lecture. Torgensen et al (1997), par exemple, ont trouvé dans
leurs études auprès d'enfants du CP au CM1 que «
... la conscience phonologique émergeait en tant qu'unique facteur prédictif de l'acquisition de la lecture. » (p.163)
Alors que des études auprès d'adultes lecteurs et
non-lecteurs apportent des preuves accablantes de ce que la conscience
phonologique est une conséquence (très limitée) de
la maîtrise de l'écriture alphabétique, quelles
preuves ou quels processus pourraient amener A conclure qu'elle
est un facteur prédictif de la réussite de
l'apprentissage de la lecture ? On pourrait supposer que, comme la
parole précède l'écriture A la fois
phylogénétiquement et ontogénétiquement,
l'écriture alphabétique repose sur une conscience
phonique (antérieure) (voir l'affirmation d'Adams ci-dessus).
S'il en était ainsi, l'orthographe devrait refléter la
parole ; ce qui veut dire qu'il devrait y avoir correspondance entre
les lettres et les sons. L'orthographe de l'anglais devrait être
une sorte de transcription phonétique - pour chaque lettre il y
aurait un et un seul son et pour chaque son une et une seule lettre (le
principe de bi-unicité). Cependant, même les partisans les
plus dévoués de la conscience phonologique en tant que
facteur prédictif de la lecture, se rendent compte que
l'orthographe anglaise est loin de remplir cette condition. Par
conséquent, des études sur les correspondances
grapho-phonologiques (par exemple, Gentile, Kamil, & Blanchard,
1983, p.113 passim) ont traditionnellement reconnu l'absence de
règles précises et logiques (c'est-A-dire le genre
de règles invariables et automatiques qui pourraient être
formulées A la manière d'un programme d'ordinateur
pour lire A haute voix) et se sont concentrés sur
l'élaboration de « généralisations ».
Ce sont en général des règles de correspondance
entre des lettres (ou des groupes de lettres) et des sons qui
s'appliquent dans un certain pourcentage de cas. Par exemple, la
règle 44 de Clymer (Clymer, 1963) « Quand il y a un e dans un mot qui finit par une consonne, le e a habituellement un son court »
s'applique dans 76% des cas dans le corpus de mots (sur lequel a
porté la recherche) comportant seulement un e et se terminant
par une consonne (il considère le mot « blew » comme
une exception). Comme le remarque Clymer, la plupart des
généralisations qu'il a étudiées
nécessitent que le lecteur ait déjA une bonne
connaissance de la prononciation d'un mot avant de pouvoir appliquer la
généralisation - par exemple plusieurs des
généralisations utilisent l'accentuation tonique,
exigeant que le lecteur sache déjA quelle syllabe est
accentuée (et aussi où sont les syllabes). Ce qu'il ne
souligne pas, c'est que la plupart des règles nécessitent
de la part du lecteur d'autres connaissances que l'accentuation et la
syllabisation. Par exemple, si l'on considère les
généralisations 1 et 2 :
1. Quand il y a deux voyelles côte A côte, le son
long de la première est entendu et la seconde est habituellement
muette.
2. Quand une voyelle est au centre d'un mot monosyllabique, la voyelle
est courte ; c'est-A-dire quand la voyelle est
a) la lettre centrale
b) une des deux lettres du milieu dans un mot de quatre lettres
c) une voyelle A l'intérieur d'un mot de plus quatre lettres.
Les règles 1 et 2 nécessitent une connaissance antérieure de :
Que sont les voyelles ? Cela peut évidemment être
enseigné mais on ne peut pas considérer qu'il s'agit d'un
acquis chez n'importe quel lecteur (par exemple, a, e, i, o, et u sont
des voyelles, mais l'on rencontre des difficultés avec w et y ;
ainsi qu'avec des voyelles comme i dans -tion et u dans -qu).
Qu'est-ce qu'un son long ? De nouveau, cela peut être
enseigné, mais ne peut pas être présumé
déjA acquis par n'importe quel lecteur.
Quand un mot est-il monosyllabique ? Comparez 'flower' et 'flour',
'quiet' et 'quite', 'diet' et 'died', etc. Qu'est-ce qui constitue le
« centre » ? Alors qu'une telle notion peut paraître
triviale, des études sur des mots exprimant la localisation chez
les enfants (par exemple, Mao & Zhu, 1992) montrent que la
connaissance du concept « milieu/centre » est acquise assez
tard dans le développement et beaucoup plus tard que des
concepts spatiaux comme dessus et dessous.
De plus, même si le sujet sait quelles lettres sont des voyelles,
ce qu'est le son long de chaque voyelle, comment déterminer le
nombre de syllabes dans un mot (avant sa prononciation), et ce qui
constitue le milieu d'une suite de lettres, ces
généralisations ont une applicabilité
limitée (la généralisation 1 s'est
appliquée A 45% des cas potentiels - Cf. 'bead' vs.'chief
'; 2a s'est appliquée dans juste 62% des cas - cf. 'dress' vs.
'scold' ; 2b dans 59% - cf. 'rest' vs 'told' ; et 2c dans 46% - cf.
'splash' vs 'fight'.
Il peut être instructif d'étudier certains
résultats de lecteurs qui essaient d'appliquer des
généralisations grapho-phonologiques, sans bien
comprendre toutes les exceptions et les nuances. Dans son étude
des erreurs commises par des mauvais lecteurs lisant A voix
haute des mots isolés, Jane Holmes (Holmes, 1978) a
remarqué qu'ils appliquaient de façon erronée la
généralisation du g ('beggar' prononcé 'badger',
'logic' prononcé comme 'loggy' ou 'logos', 'strength'
prononcé comme 'strange') et du c ('cactus', lu comme 'kastus',
'delicious' prononcé 'delikus', 'certain' lu comme 'carton' ),
et trouvé des cas où les lecteurs ont attribué des
valeurs phonétiques aux consonnes «muettes» (comme
dans 'bristle' lu 'bristol', 'calm' lu comme 'column', et 'debt' lu
comme 'debit' - un cas on ne peut plus intéressant, le b
rappelant l'étymologie commune des deux mots. Les données
de Holmes montrent ce qui se passe quand quelqu'un essaie d'appliquer
les correspondances grapho-phonologiques : ça ne marche pas. Le
fait est que les règles de la prononciation s'appliquent aux
mots mais pas aux lettres ou aux groupes de lettres. La lecture
A haute voix est faite en sachant (ou quand quelqu'un vous dit)
comment chaque mot d'un texte doit être articulé. Dans ce
sens (au sens de la lecture comme traitement d'un langage pour
l'œil) il n'y a pas beaucoup de différences entre la
lecture d'une langue alphabétique comme l'anglais et d'une
langue idéographique comme le chinois classique - un fait
souligné il y a de nombreuses années par John Carroll
(Carroll, 1972).
Une manière d'aborder le problème de la relation causale
entre la lecture et la conscience phonologique est de définir
« la lecture » d'une façon telle qu'on soit
sûr que la conscience phonologique y joue un rôle. C'est
l'essence de la notion de décodage. Dans de telles
études, le chercheur montre habituellement que la
capacité d'un enfant A oraliser des séries de
lettres ( mots ou même non-mots) est améliorée par
l'entraînement de la conscience phonologique Mais cette
habileté A décoder n'a rien A voir avec la
lecture au sens usuel de ce mot (comme défini ci-dessus). Ceci
étant, personne, A ma connaissance, n'a montré que
la conscience phonologique (enseignée ou non)
améliore/accroît/prévoit la capacité d'un
enfant A comprendre un texte écrit.
Au cas où la distinction entre décodage («
oralisation ») et lecture A haute voix ne serait pas
claire, permettez-moi de procéder A une illustration.
Décoder est la capacité A traiter des
séries de lettres comme une transcription phonétique.
C'est A dire attribuer A chaque lettre une valeur
phonétique, comme dans l'exemple où on « oralise
» SUMETHONKILD comme [sumnkld] ou AKEADDOBEN comme [kejdobn] (qui
est la manière dont mes étudiants de licence ont
prononcé ces séries). Lire A haute voix, au
contraire est le processus qui permet de retrouver un mot A
partir de données graphiques et ensuite de prononcer la forme
orale de ce mot comme cela est illustré en prononçant
SOMETHINGOLD comme "something old"(quelque chose de vieux) ou "some
thin gold"(de l'or fin) ou bien AREALLOVER comme "a real lover"(un vrai
amant) ou "are all over"(sont fini(e)s). C'est A dire que la
lecture A haute voix nécessite une identification
antérieure des constructions linguistiques (des mots, dans ce
cas) avant de pouvoir les prononcer.
Cependant il existe une forme d'écriture dans laquelle la
prononciation doit précéder la compréhension. Cela
est connu sous le nom d'« oral-écrit » et se
rencontre dans les plaisanteries des gens linguistiquement
raffinés, comme ce souhait de la Saint-Valentin, BEAM EYE BALE
AND TINE BE COURSE ISLE OF EWE (Be my valentine because I love you) ou
dans les erreurs d'écriture des gens moins instruits, par
exemple, 'intense of purpose', 'his a good athlete', 'firstable', 'she
would of', 'you're a good person', 'their nice', (2)
etc. La conscience phonologique peut alors très bien
correspondre A la capacité d'oralisation des mots ou des
non-mots des enfants (pourvu que leur orthographe remplisse les
conditions de correspondance grapho-phonologique comme dans les
exemples présentés ci-dessus). Cela n'a, cependant,
aucune relation démontrable avec la compréhension d'un
texte écrit.
La conception de l'orthographe comme étant de
l'oral-écrit est la conséquence, d'après moi, de
l'enseignement initial de la lecture, où on apprend aux enfants
de plusieurs manières que Bloomfield avait raison, que pour
comprendre l'écrit, il faut d'abord le transformer en oral. Mais
les enfants sont plus intelligents que ça ; en relativement peu
de temps, la plupart d'entre eux réalise que l'écrit
n'est pas de l'oral. Une des meilleures illustrations de cette prise de
conscience est une étude de Doctor et Coltheart (1980)
concernant la capacité des enfants A détecter des
mots qui ne veulent rien dire dans des phrases imprimées. On a
demandé A des enfants âgés de six A
dix ans de dire si les séquences imprimées avaient un
sens ou non. Dans quelques-unes de ces séquences, la forme
écrite est absurde, mais si elle est prononcée, il en
résulte une expression sensée. C'est le cas pour : "he
ran threw the streets."(3)
Doctor et Coltheart ont montré que de telles expressions
correctes phonologiquement / incorrectes graphiquement étaient
jugées comme dépourvues de sens de façon
croissante avec l'âge ; par exemple, A l'âge de six
ans, 70% des enfants acceptaient de telles orthographes alors
qu'A l'âge de dix ans 21% seulement pensaient qu'elles
avaient un sens.
Ces résultats montrent deux choses : premièrement
qu'apprendre aux enfants A traiter l'écrit comme si
c'était de l'oral échoue en grande partie - les enfants
développant leurs savoir-faire en lecture ils deviennent moins
bien disposés A utiliser des données phonologiques
pour traiter l'écrit (notez bien : si les enfants apprenaient en
fait A traiter l'écrit en l'oralisant avant de le
comprendre, leur acceptation du sens de telles phrases devrait
augmenter et non diminuer avec l'âge ; après tout, "he ran
threw the streets" est une façon parfaitement correcte de
l'écrire si on doit se fier A la prononciation.)
Les auteurs en ont conclu que les très jeunes lecteurs se fient
énormément au décodage phonologique quand ils
lisent pour le sens ; mais, quand ils deviennent plus grands, la
confiance en la compréhension visuelle directe devient
progressivement plus importante (parce que, bien sûr, ils se
rendent compte que la stratégie de « phonologisation
» ne fonctionne pas). Deuxièmement, le fait que la courbe
de développement s'infléchisse A l'âge de
neuf-dix ans montre que tous les enfants ne prennent pas conscience que
l'oral et l'écrit sont des façons fondamentalement
distinctes de représenter le langage. Les 20 A 30%
d'enfants âgés de neuf-dix ans qui continuent A
considérer "threw" comme une façon parfaitement correcte
d'écrire "through" est entièrement cohérent avec
le pourcentage d'adultes anglais qui savent lire et écrire mais
qui continuent d'identifier l'écrit A l'oral (Scholey et
Willis, 1990) et écrivent immanquablement des choses comme 'she
would of', 'their no good', 'his a goog guy' (4) etc.
RÉSUME ET CONCLUSION
Le fait est que l'anglais écrit et l'anglais oral ont peu de
choses en commun en ce qui concerne leurs constructions linguistiques
(Scholey, 1997).
Alors que la parole n'est pas segmentée, est
éphémère et séquentielle, l'écriture
anglaise est segmentée A plusieurs niveaux,
non-séquentielle au sens où elle peut être
parcourue dans toutes les directions, et est permanente.
L'écriture utilise plusieurs manières de marquer le sens
et la fonction qui n'ont pas d'équivalents A l'oral. Les
espaces qui séparent les mots, l'orthographe, l'utilisation des
lettres minuscules et majuscules, et des signes comme les virgules et
les apostrophes n'ont aucun équivalent oral (Bradley, 1913).
Il n'existe pas de règles grapho-phonologiques qui puissent
transformer "she would have done it if she could have"(elle l'aurait
fait si elle avait pu) en [id cd cntfikd c]. Des représentations
si disparates ne sont liées qu'au niveau sémantique et
c'est seulement leur identité de sens qui les rend toutes les
deux anglaises.
Il n'existe pas de systèmes d'écriture vraiment
phonétiques, et d'ailleurs il ne devrait pas en exister. Le but
d'une orthographe est très différent de celui d'un
système phonétique. Les orthographes sont faites pour
véhiculer du sens, et elles y réussissent en ignorant les
variations des dialectes ou des langages idiosyncrasiques. L'anglais
écrit est standard pour l'orthographe et la ponctuation, alors
que l'anglais parlé varie énormément d'un groupe
A l'autre et d'un individu A l'autre. En
conséquence, l'orthographe ne favorise aucun dialecte
régional, ethnique ou économique, et inversement, ne
crée aucune inégalité dans l'accès A
la langue écrite.
Si quelqu'un souhaite montrer que la conscience phonologique rend plus
facile ou est A l'origine de l'acquisition de la lecture (dans
le sens où la lecture est entendue ici - lire pour le sens), il
sera nécessaire de montrer que la capacité d'un enfant
A conceptualiser la parole comme une suite de segments phoniques
discrets (qu'ils soient enseignés ou non, syllabiques ou
sub-syllabiques) facilite l'acquisition de la lecture experte. Avant
qu'une telle étude soit entreprise, il serait important de
réfléchir A cette question : parmi les milliers de
gens qui ont reçu une formation en analyse et en transcription
phonétiques, en connaît-on un seul que cela ait rendu
meilleur lecteur ? A
notes
(1) "rich" et "which" se prononcent "ritch" et "whitch" NDLT
(2) 'his a good athlete' au lieu de 'he's a good athlete', même prononciation NDLT
'their nice' au lieu de 'they're nice' NDLT
(3) "he ran threw the streets."( "threw" =lancé A la place de"through"=A travers) NDLT
(4) 'their no good' au lieu de 'they're no good'
'his a goog guy' au lieu de he's a good guy
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