La revue de l'AFL Les actes de lecture n°62 juin 1998 ___________________ Un exemple de démarche dans la phase de théorisation : Le
texte ci-après d'Annie Janicot fait suite A la présentation
d'un exemple d'apprentissage de la lecture d'un texte en classe de CP/CE1
dans le cadre du dispositif d'enseignement autour de la « leçon
de lecture » mis au point dans le cadre de la recherche Lecture et
voie directe (Une leçon de lecture
au CP/CE1, A.L. n°60, déc.97, p.62).Annie Janicot y expose,
en effet, un des aspects du travail de théorisation (celle de la
« prise de notes ») faisant suite A la découverte
d'un texte.
Comment s'y prendre pour aider les élèves A théoriser ce qui a été noté au cours de la leçon de lecture ? Comment les aider A sortir du contexte du texte lu, A construire des notions abstraites et une méthodologie ? Marie-Hélène Lambert, dans le cadre de réflexion de la recherche 5-8 ans, propose aux élèves de reformuler, de titrer, puis de trier les notes prises au cours de la découverte de texte. Le travail présenté
ici a été effectué A la suite de la découverte
d'un extrait du texte Loulou de Grégoire Solotareff
(L'école des Loisirs, 1991). L'album est présenté
par la première et la quatrième de couverture (livre ouvert),
ainsi que par la page de garde et des commentaires critiques de l'album
trouvés dans La Revue des Livres pour enfants et un catalogue
de l'éditeur. Après cette entrée dans le paratexte
et une première émission d'hypothèses A partir
du titre, des illustrations, et des critiques, les enfants retiennent,
pour l'étude du texte, la question suivante :
En général, CP et CE1 travaillent ensemble, en demi-groupes-classe (l'un en découverte de texte, l'autre en autonomie pour l'entraînement). Pour ce texte, et A ce moment de l'année, (mars 1998), l'enseignante a organisé différemment le travail : par petits groupes, composés de CP et de CE1, les élèves ont fait une première lecture du texte, les CE1 étant chargés de lire le texte aux CP qui ne sont pas tous autonomes, les CP ayant pour rôle de surligner, au fur et A mesure, les désignations des deux personnages découverts lors de la présentation du livre. Puis, afin de donner d'autres éléments de repère aux CP, pour les aider A répondre A la question ci-dessus, les CE1 ont recherché la structure du texte (dénombrement et titrage des paragraphes - première approche effectuée systématiquement sur chaque texte) : ils ont présenté le plan du texte aux CP. Au moment de la découverte,
l'enseignante prend des notes autour du texte projeté (Voir par
exemple, A.L. n° 60, Une leçon
de lecture au CP/CE1). Ces notes sont numérotées au fur
et A mesure, pour être réutilisées dans la phase
de théorisation, phase d'observation de la manière de lire
le texte, et de précision du fonctionnement de la langue écrite.
1 - Reformulation des notes Mise en situation : L'enseignante
a recopié (colonne de gauche) dans l'ordre les notes dispersées
autour du texte, mais numérotées au fur et A mesure.
Avec les enfants, il s'agit de se souvenir de "Pourquoi on a écrit
ça ?" et de préciser ce qui "nous" intéresse (colonne
de droite). Plusieurs types de remarques peuvent être faites A
partir d'une même note (cf. note 4) : l'enseignante anticipe un futur
tri des notes et répète le chiffre de la note d'origine.
2 - Titrage des notes Mise en situation : les enfants reçoivent
les notes reformulées et recopiées. Ils sont par groupes
de 4, seuls en ateliers, l'enseignante travaillant avec un autre groupe,
mais attentive A ce qui se dit pour aider.
Les enfants ont inscrit des formulations
diverses : par exemple "des mots qui disent "quand" l'histoire se
passe", "des indicateurs de temps". Les deux sont justes. En fonction
du moment dans l'année, les deux sont conservées ; peu A
peu, la formulation la plus abstraite (et la plus "officielle") est maîtrisée
par de plus en plus d'enfants.
L'affichage de la classe s'est progressivement
et lentement structuré ainsi :
Le tableau ci-dessous montre l'aboutissement
du travail sur cet extrait après le "titrage" et la répartition
en différents domaines. Il constitue la trace de théorisation
de ce texte que les enfants collent dans leur cahier de lecture.
Tri de notes : LOULOU A - Au niveau du texte
B - au niveau des phrases
C - Au niveau des mots
D - Des règles pour
écrire sans erreur
Selon cette démarche, la théorisation ne s'effectue pas en une seule séance. Les enfants ont, de toutes façons, besoin de temps pour prendre des repères et assimiler les notions. Ils sont très actifs dans la construction de leur connaissance de la langue et de la lecture, peu de choses sont commentées en collectif sans qu'ils n'aient participé A l'élaboration de la situation, A leur table, crayon en main, aidés de 2 ou 3 élèves. Les CE1 ont un rôle de tuteurs vis A vis des CP : au moment du titrage des notes, ils vérifient que les CP sachent lire les mots et sachent dire la raison pour laquelle on les a écrits ou pour laquelle ils sont ensemble. Ce tableau sert, ensuite, de point d'appui pour l'élaboration de l'entraînement : les enfants proposent des exercices en fonction des rubriques qu'ils connaissent (Contrat d'entraînement : mémorisation des mots, fonctionnement de l'écrit, démarche de lecture, recherche en BCD, production d'écrit). "Il faut que l'on apprenne A...". Ils s'adressent A l'enseignante : "Fais-nous un exercice avec des intrus, on se trompe encore", etc. Certes, ils ne conçoivent pas tout, mais lorsqu'ils reçoivent leur contrat, ils ne sont pas surpris par le contenu. Les enseignants du groupe de recherche 5-8 ans, confrontant leurs pratiques, démontrent que le dispositif "leçon de lecture" se module en fonction des textes, des niveaux de classe, des moments dans l'année et de leur personnalité. Dans une autre classe (dans certaines Grandes Sections, par exemple), la théorisation s'effectue sur un ou deux points seulement, les plus pertinents A ce moment-lA, ou les plus caractéristiques du texte. Mais le dispositif ne perd rien de son efficacité, liée A l'implication des élèves dans la construction de leur apprentissage. |
Annie Janicot
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