La revue de l'AFL

Les actes de lecture   n°66  juin 1999

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DESCRIPTION DES PRATIQUES DANS LES  
CENTRES DE CLASSE-LECTURE  

Après avoir rendu compte dans les deux numéros précédents (A.L. n°64, déc. 98, pp.26-32 et n°65, mars 99, pp. 24-30) des résultats de la recherche INRP-IUFM sur L'évaluation et le suivi des classes-lecture pour les axes 1, 2 et 3 (*), nous publions ci-après des éléments d'information rendant compte (partiellement) des travaux conduits par le groupe (**) qui a travaillé autour de l'axe Des centres-lecture : description des pratiques. Ce groupe a pris le parti de ne présenter ici que des extraits de son rapport. Le lecteur soucieux de compléter son information devra se reporter au contenu de la brochure publiée (accessible sur simple demande A l'AFL) qui présente la totalité des comptes-rendus établis par les quatre équipes. Les quatre centres ont été auto-observés A partir d'une grille commune, en 1996-1997. Il s'agit des centres de Dunkerque, de Grenoble, des Alpes-Maritimes et de Roubaix.  

(*) Cf. Une recherche en cours, J.Pierre Bénichou, A.L. n°57, mars 97, pp. 28-31(**) Groupe constitué des personnes suivantes : Alain Déchamps, Hervé Dufour, Jean Foucambert, Françoise Laurent, Raymond Plateau, Françoise Tack.   

Ce qui frappe, c'est l'hétérogénéité des dispositifs. Sous l'appellation commune de centre de classes-lecture, nous sommes en présence d'un foisonnement de modalités de travail. Il faut en chercher l'origine dans les circonstances de création des différents centres. Deux centres, celui de Grenoble et celui des Alpes Maritimes, se développeront sur des présupposés proches de ceux de l'AFL en prenant toutefois des formes différentes puisque le premier accueille des classes extérieures en demi-pension tandis que le second conduit son travail directement dans l'espace des classes concernées. Les 2 autres centres constituent A l'inverse des variations fortes autour du thème central au point de n'avoir parfois en commun avec Bessèges que le principe d'une action massive et groupée en direction du rapport A l'écrit. On observe donc des différences importantes entre ces 4 centres, aussi bien sur le niveau des classes accueillies (du CP au CM2) que sur leur nombre simultané (de 1 A 4), sur la durée de l'action (de 2 A 4 semaines), sur la possibilité d'un suivi, sur la diversité des adultes accueillis, etc.  

QUELLES NEGOCIATIONS PREALABLES ?  

Le rapport décrit dans le détail ces négociations, notamment pour faire compendre comment le centre de classes-lecture a préparé le séjour avec les enseignants accueillis, comment ceux-ci expliquent aux élèves leur demande de formation, comment les enfants réagissent A cette demande, comment le centre de classes-lecture accueille et prend en charge les nouveaux rapports qui se créent entre les enfants et les adultes accueillis. 

Dans les quatre centres, une phase préparatopire est organisée (et généralement on a recours au stage préparatoire). D'une manière générale, les choses semblent aller de soi pour tout le monde. Il faut s'accorder sur ce qu'on vent faire ensemble. Mais, même si ce n'est pas aussi simple qu'on le dit, pour les enseignants candidats A un stage un pas important a été franchi dans l'affirmation d'un professionnalisme qui sait rencontrer la confiance des collègues, des parents et des enfants en se situant, grâce A la formation continue, A la pointe des techniques pédagogiques nouvelles. Cette demande de formation est alors le contraire de l'expression d'une incompétence. Qui ne se réjouit que son médecin ou son réparateur de chauffe-eau en fasse autant ? Mais cette affirmation tranquille de l'intérêt de se perfectionner change le statut du "maître" en le posant comme un artisan et non comme un artiste, quelqu'un dont l'exercice professionnel est, par définition et au sens propre du terme, discutable. De lA A reconnaître que l'échec n'est pas seulement imputable A l'élève ou au manque de moyensA L'enseignant qui vient avec ses élèves et des parents dans un lieu pédagogique où on ne fait pas ce qu'il fait d'ordinaire, et sans doute pas non plus ce qu'il sait faire, accepte que son statut soit mis en cause, et devant les témoins les plus directement impliqués. Au fond, il prend le beau risque de mettre en pratique cette profonde remarque de Claparède : "Qui a cessé d'apprendre est indigne d'enseigner". Mais, ce faisant, il modifie la représentation traditionnelle du Savoir, ce quelque chose que les uns ont et qu'il s'agit de transmettre A ceux qui ne l'ont pas. Il pose en actes l'idée que c'est quelque chose qui se construit, qui se construit A plusieurs, qui se construit pour l'individu comme pour la société, pour l'enfant comme pour l'adulte. Dès lors, la venue en classe-lecture ne peut pas, qu'on y travaille explicitement ou non, ne pas transformer pour l'enfant son rapport au savoir et aux processus de sa construction, déjA parce qu'elle lui permet de voir des adultes qui lui sont proches en train d'apprendre, avec lui. C'est, très probablement, une des premières fois, sinon la première, qu'il est témoin et acteur d'une situation "instituée" de ce type. Quel appui y trouve-t-on pour mettre le dur métier d'apprendre au centre d'une réflexion collective.  

LES TROIS PREMIERES HEURES  

Nous nous sommes intéressés A la manière dont démarrait un séjour dans la mesure où il ne va pas de soi de quitter le fonctionnement ordinaire de la classe pour se préoccuper (enfin ?) de lecture et d'écriture. Quelle mise en scène introduit-on pour poser ou masquer ce problème ? Chaque centre présente ici un démarrage réel. 

.../... 

...Du côté des accueillants, l'affaire semble rôdée mais rien ne peut empêcher que, pour les accueillis, c'est la première fois ! S'il n'y a rien d'étonnant A aller A la montagne pour une classe de neige, il ne semble pas non plus d'avoir A s'étonner d'aller dans un centre spécialisé pour faire de la lecture ou, pour le cas des Alpes Maritimes, d'avoir besoin de recevoir le renfort de 4 personnes. Est-ce un faux problème ou cette apparente facilité n'est-elle que la manifestation continuée de l'habitude de ne pas se poser ce genre de question ou, plus simplement une marque de confiance ou encore le résultat d'une bonne préparation ?   

LE BUDGET TEMPS DES ENFANTS 

Les emplois du temps, mieux que les descriptions données par les centres eux-mêmes, traduisent bien les priorités différentes. On le voit notamment dans le choix entre des plages d'activités qui occupent jusqu'A une demi-journée autour d'activités qu'on peut qualifier de "polycentrées" et des plages qui correspondent A des moments précis et successifs, A horaires fixes, dans le cas d'activités "monocentrées". 

Au-delA de ce constat, c'est la signification A accorder A la place de ces divers temps qu'il faut trouver. Les activités polycentrées placées en début de journée et de séjour marquent la volonté des accueillants de bâtir le séjour autour de la notion de projet et de mettre en place les conditions de la prégnance de celui-ci sur les activités d'enseignement de type traditionnel. Un emploi du temps plus morcelé et rigoureux dans lequel les activités polycentrées sont diluées montre a contrario la prégnance des activités d'enseignement comme éléments A assembler dans la réalisation du projet. Au fond, ce qui est posé ici, c'est la centration de la classe-lecture sur la démarche de projet ou non. 

Ces emplois du temps sont sans doute assez révélateurs des motivations initiales des créateurs de chaque centre. En ce sens, Dunkerque et Roubaix ont en commun d'avoir été voulus par des inspecteurs persuadés qu'il faut revoir un certain nombre de fondamentaux de l'enseignement de la langue, qu'il s'agisse de lecture ou d'écriture. Ces centres ont été conçus comme des lieux de formation continue pour une ou des circonscriptions au service d'une stratégie de rénovation de l'enseignement du français et partant, de manière réaliste, de l'existant, des pratiques et des représentations des enseignants. Il s'agit donc de faire évoluer les leçons de lecture et d'expression écrite, de créer des ateliers de travail autonome et individualisé pour les exercices et, très secondairement, de finaliser ces investissements méthodologiques dans une plus grande ouverture sur le milieu. C'est ainsi que les projets tournés vers l'extérieur sont davantage centrés sur l'étude du milieu que sur l'action dans le milieu.  

A l'inverse, Grenoble et les Alpes-Maritimes sont nés d'une conception plus globaliste, ne séparant pas la nécessaire évolution des investissements techniques d'un fonctionnement général de l'école autour d'ateliers permanents utilisant naturellement dans leur production du savoir lire et du savoir écrire. Ces ateliers permanents visent prioritairement la production d'un journal quotidien et le fonctionnement de l'observatoire des écrits que représente la BCD. La progression technique apparaît alors comme théorisation et systématisation de ce que chaque acteur met en îuvre dans la conduite de ces ateliers permanents. On ne peut trouver meilleure opposition entre cette approche et celle de Roubaix et Dunkerque que le statut donné au produit du travail d'écriture : pour les uns (Roubaix et Dunkerque), un "objet" devra avoir pris corps A la fin du séjour et les activités convergent vers sa production1 ; pour les autres (Grenoble et les Alpes-Maritimes), l'objet préexiste et exige une écriture quotidienne, c'est en le faisant fonctionner, de jour en jour, et en y prenant une part de plus en plus importante, que s'ouvre, pour chaque enfant, une zone d'apprentissage proximale dans laquelle l'enseignement trouve A se programmer. 

Néanmoins, dans tous les cas, on rencontre au moins 3 types d'activités : celles qui se constituent autour de la pratique de la lecture, celles qui traitent de la bibliothéconomie et celles qui sont du domaine des aides techniques A la lecture et l'écriture. 

Les pratiques de lecturePlusieurs approches se dégagent :

- Lecture et écriture de journaux 
"Tapage" dans les Alpes-Maritimes et "La Chronique" A Grenoble sont écrits, publiés et lus chaque jour par les participants au séjour. Dans les 2 cas, la plage du matin, juste après l'accueil, est le moment réservé A cette rencontre où chacun prend connaissance des nouvelles du jour. Un temps de discussion et d'échange suit la lecture. L'écrit est ici un outil de traitement du vivre ensemble.

- Présentation de livres
On observe dans tous les centres une très forte prise en compte de la littérature jeunesse. Dans les Alpes-Maritimes et A Grenoble, la présentation de livres par les adultes est quotidienne ; elle s'accompagne de débats auxquels les enfants sont associés en donnant leur avis après une lecture individuelle. A Dunkerque et Roubaix, des moments particuliers sont réservés au cours des séjours pour échanger autour des livres ou pour présenter des livres sur un même thème afin de choisir celui qui fera l'objet d'une lecture suivie. 

- Lecture dirigée
On trouve dans les emplois du temps de Dunkerque et de Roubaix des moments spécifiques réservés A un atelier de lecture. Cet atelier a pour objectif d'aider A la mise en place de stratégies de lecture spécifiques A des types d'écrits (album, conte, recette, etc.) 

- Les activités A la BCD
La BCD est un lieu essentiel des centres de classes-lecture qui sert A la fois A la mise en îuvre de projets d'écriture, de lieu d'information, de lieu ressource, de lieu d'animation et de recherche, etc. Tous le s centres consacrent le temps nécessaire A l'entraînement des compétences de base pour utiliser des bibliothèques (ordre, classement, repérage, aides A la lecture, etc.) et A la gestion des fonds.

- Les activités techniques 
Ces aides relèvent de la théorisation et de l'entraînement systématique. Elles utilisent le plus souvent des supports et des outils précis. Dans tous les centres, se retrouvent des plages "informatiques" qui sont réservées A des temps de perfectionnement des aspects techniques de la lecture. Roubaix propose en outre un travail systématique autour de la lecture grâce au rétroprojecteur.

- Ateliers de lecture
A Roubaix et Dunkerque, une organisation de la classe en atelier est systématiquement entre- prise. Un adulte prend en charge un groupe, l'autre est en travail autonome. Les enfants ont une fiche atelier, des choix dans une progression et un système d'auto-correction.  

LE BUDGET TEMPS DES ADULTES 

.../...L'aspect plus ou moins reconnu et plus ou moins revendiqué de la formation des enseignants détermine les modalités du déroulement de la journée des adultes. On est ici devant une question décisive car il est évident qu'aucun centre de classes-lecture n'imagine que le destinataire de son action est durablement l'élève qui participe au stage. Les problèmes de lecture doivent trouver leur solution quotidienne lA où ils se vivent quotidiennement, c'est-A-dire dans l'école et dans l'environnement social et familial des élèves. Comparé A ce travail de fond, chacun sait que ce n'est pas un coup de pouce de quelques jours au cours d'une scolarité qui va changer grand-chose. Le rôle d'un centre de classes-lecture est ailleurs, dans la capacité de faire évoluer le fonctionnement des enseignants, des équipes d'école et leurs liens avec les autres acteurs de la lecture dans le quartier. 

Tout ce qui est entrepris avec les enfants doit donc être lu A un autre niveau, dans la modification des représentations et des actions des enseignants de retour, non seulement dans leur classe, mais dans leur école et leur quartier. On imagine volontiers la diversité des situations selon l'ensemble des conditions de création des centres. Sans revenir ici sur les grandes options pédagogiques visibles dans l'emploi du temps des enfants (la place d'un enseignement disciplinaire, le rôle du projet, etc.), la question se pose d'un temps spécifique de "formation" des adultes accompagnant les classes accueillies. Plusieurs étapes sont A considérer : la préparation des séjours, le travail au quotidien, le bilan et suivi du séjour. 

.../... 

Ce qui colore le budget-temps des adultes accueillis, c'est l'aspect compagnonnage entre pairs. Et c'est sans aucun doute une caractéristique forte des centres de classes-lecture. Le maître de stage commence par travailler lui-même devant l'apprenti, avec le matériau de celui-ci (les élèves) et sur la durée. Ce dispositif de formation fonctionne sur une double décentration. Le maître accueilli peut opérer un retour réflexif sur sa propre pratique A travers le regard qu'il pose sur la pratique d'un autre. Ce "luxe" est d'ordinaire réservé aux conseillers pédagogiques et aux inspecteurs, voire aux professeurs d'IUFM, qui n'ont pas ou plus de lieu personnel de réinvestissement pratique et s'en servent seulement pour conseiller ou enseigner des enseignants, c'est-A-dire qu'ils procèdent vis-A-vis de l'apprenti d'une manière différente de celle qui leur a permis de "savoir" ce qu'ils cherchent A transmettre. I1 ne s'agit pourtant pas ici de prôner la leçon modèle mais de faire réfléchir au pouvoir formateur de cette décentration qui permet A un professionnel (l'accueilli) d'opérer un retour réflexif sur sa pratique A partir de l'observation d'un autre professionnel (l'accueillant) : Une seconde décentration porte cette fois sur l'élève qui n'est plus ici considéré comme le propre obstacle au projet qu'on a sur lui (projet qu'il comprenne ou qu'il fasse ou qu'il se taise, etc.) mais comme acteur dans un événement dont on ne porte pas la responsabilité. C'est sans doute alors, parce qu'on n'a pas A vaincre sa "résistance", qu'on peut découvrir sa cohérence et réfléchir A la manière dont l'interaction pédagogique prend (pour le "bon" élève) ou non (pour le "mauvais") appui ordinairement sur un comportement global.  

LES PROJETS .../... Le mot "projet" apparaît dans les options pédagogiques prises par les centres Lecture. Il s'applique A une forme de pédagogie. Mais il semble que cette pédagogie recouvre des pratiques différentes suivant les lieux. 

Quelques constatsLes projets examinés sont ici ceux liés A une production de lecture-écriture. 

w Si les projets se déroulent tous dans la matinée, la lecture des différents emplois du temps des enfants nous apprend que tous les centres n'y consacrent pas le même volume horaire pendant un séjour : 
- A Roubaix et Dunkerque, le temps consacré au projet est d'une demi-heure quotidienne par enfant sur les deux ou trois semaines du séjour, soit 1/12 du temps ; 
- Dans les Alpes Maritimes, entre 60 et 75 minutes sont consacrées le matin au projet, et ceci durant les trois semaines du séjour ; l'après-midi, les animateurs culturels et sportifs poursuivent les projets dans leur réalisation matérielle. C'est donc sans doute plus du quart du temps qui y est consacré, 
- A Grenoble, le temps consacré au projet est d'une heure trente A deux heures quotidiennes par enfant pendant les quatre semaines du séjour, soit 1/3 du temps. 

w On note également que suivant les centres, la gestion des projets n'est pas organisée de la même façon : 
- A Roubaix et Dunkerque, l'emploi du temps est découpé en une suite d'activités : exercices de lecture et d'écriture, activités artistiques ou sportives, sorties culturellesA Curieusement le temps consacré au projet lui-même peut passer inaperçu A la lecture de l'emploi du temps. Les centres précisent donc que ce qui est appelé "écriture ou atelier d'écriture" dans l'emploi du temps est le moment où les enfants produisent pour leur projet : rédaction des articles du journal, écriture des différents épisodes de l'album en cours de réalisationA Les autres activités mentionnées concourent A une acquisition de savoirs que les enfants pourront réutiliser au moment opportun pour mener A bien leur projet. Certaines de ces activités peuvent se mettre aussi au service des projets. Elles sont menées par des spécialistes (ou des enseignants), elles apportent un plus A la production finale : des illustrations pour l'album en cours d'écriture, une affiche pour annoncer une exposition par exemple. 
- A Grenoble et dans les Alpes Maritimes, le projet est un tout. Les différentes tâches A conduire pour arriver A la production finale sont listées par le groupe en charge du projet. Ces tâches peuvent amener le groupe A lire, écrire, échanger, dessiner, manipuler des outils informatiques, réaliser des affiches, faire des sorties... Des interventions de spécialistes (plasticiens, bibliothécaires, informaticiens...) sont parfois nécessaire A la réalisation du projet. Elles sont incluses dans le temps projet ou font l'objet d'une dérogation A l'emploi du temps type. Le groupe définit ses propres besoins de formation en fonction des difficultés qu'il rencontre lors de la mise en îuvre du projet. Les enfants peuvent être ainsi amenés A s'entraîner, systématiser pour acquérir une compétence nécessaire A la réalisation du projet : maîtriser certaines notions de bibliothéconomie pour tenir son rôle de conseiller A la vente le jour de l'exposition vente de livres, connaître les éléments constitutifs d'un article de journal pour rédiger un article du numéro 0 du prochain journal de l'écoleA  

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Deux conceptions de la pédagogie de projet :Dans la première, le projet fait partie d'un processus de transmission de savoirs. Le projet tient lieu de mise en îuvre de ce qui a été enseigné, il devient un exercice vivant. Il est le point d'application des enseignements. On passe ainsi de l'enseignement aux apprentissages. Les enseignants y trouvent le sens A donner aux apprentissages de leurs élèves. Le projet est mis en parallèle A d'autres activités. On part d'un corps de savoirs constitués. Un état de la question est fait au moyen d'évaluations passés par les élèves. Des ·savoirs sont listés. Choisis parmi les "meilleurs", ils sont A acquérir ou A renforcer. Le projet est lA pour mettre en pratique ces savoirs. Le centre-lecture est un dispositif de transmission des savoirs avec des intentions normativesDans la deuxième, le projet tente de mettre en place un processus de production de savoirs. Il est le point de départ de tout apprentissage. C'est un projet de vie. Dans le projet défini ainsi, les acteurs sont aussi bien des enfants que des adultes. Les activités de systématisation sont mises en place pour entraîner sur les difficultés rencontrées lors du projet. 

Les classes-lecture de Dunkerque et Roubaix sont plus proches de la première conception : transmission de savoirs, contrairement aux classes-lecture de Grenoble et des Alpes-Maritimes qui se reconnaissent d'avantage dans la deuxième : production de savoirs. Ceci s'explique sans doute par l'histoire de chaque centre : qui a créé le centre, quel cahier des charges a été mis en place, quels étaient les référents pédagogiques des différentes équipes ? Cependant les centres évoluent, il est préférable de les observer sur leurs pratiques plutôt que sur leurs intentions afin de mieux saisir quelle réalité recouvre pour eux au quotidien la pédagogie de projet. 

.../...  

En conclusionCette question de l'existence et de la nature du projet est centrale dans le débat pédagogique général. Et, de ce fait, mal posée aujourd'hui, volontairement ou non. Ce qui est finalement en question, c'est de décider si le projet est affaire de pédagogie ou d'épistémologie. D'un point de vue pédagogique, le projet n'est jamais qu'un moyen dans une stratégie de transmission de savoirs et le débat oppose immanquablement d'une part ceux qui le situent au début de la séquence comme l'occasion de révéler les besoins, mettre en situation les manques, rendre fonctionnels les investissements qui vont suivre ou, plus simplement, faire office de motivation et d'autre part ceux qui le situent au terme de la séquence comme l'occasion d'un réemploi, le dépassement de l'obstacle, le réinvestissement et la systématisation. Les joutes opposent les tenants de la contextualisation et ceux de la décontextualisation du savoir. On en vient alors A des considérations sur le " coût " du projet dont on peut toujours craindre qu'il prenne trop de temps par rapport A ce qu'il prépare ou exerce. En opposition A ces dispositifs pédagogiques de transmission qui suppose l'extériorité du savoir, l'apprentissage de sa mise en îuvre et/ou sa rencontre fonctionnelle, la perspective épistémologique voudrait considérer le projet comme lieu et processus de l'élaboration du savoir. Il s agit d un projet de production réelle dans, vers et avec d'autres agents sociaux. Le savoir est alors défini comme ce qui se transforme chez l'individu par son entreprise d'agir sur le monde pour le transformer, une sorte de refus de la séparation entre travail productif et travail intellectuel, une réflexion sur la différence entre connaissances qui se transmettent et savoirs qui s'élaborent et dont la nature et l'effet vont dépendre de la situation dans laquelle ils sont produits. On voit bien que ces deux conceptions du projet se partagent les options des centres de classes-lecture et sans doute de manière plus lucide que dans les débats habituels.  

LES ACTIVITES D'ENSEIGNEMENT- Le rapport les décrit dans le détail. On se contentera ici de citer in extenso la conclusion de ce paragraphe.Les centres de Grenoble et des Alpes-Maritimes ont un air de famille assez prononcé avec feu le centre de Bessèges. Les enfants ont grandi et chacun a suivi son chemin sur des voies différentes mais qui se rejoignent, se recoupent, s'éloignent, etc., dans le temps. L'environnement humain, les expériences de chacun influencent le cheminement de ces deux centres, mais la source de réflexion théorique transpire A travers les réponses données A leurs questionnement. 

Ce sont les activités de lecture qui prédominent dans les centres observés avec :- ELMO A Grenoble et dans les Alpes-Maritimes. A la différence de Bessèges, ATEL est utilisé en parallèle A ELMO A Grenoble. Type d'activité, systématisation, théorisation. Grenoble est le centre qui consacre, de façon notable, le plus de temps au travail A partir d'ELMO et ATEL ; 
- travail sur un texte long, A Roubaix et dans les Alpes-Maritimes, ce qui ne se faisait pas A Bessèges. Dans les Alpes-Maritimes, le travail sur texte long occupe une place importante pour aboutir A une systématisation et une théorisation ; 
- sur les différents types de textes et d'écrits, A Grenoble et Roubaix. Systématisation, théorisation sur texte long et types d'écrits occupent A Roubaix une plus grande plage horaire. 

Viennent en deuxième position les activités BCD :- la bibliothéconomie prend la plus grosse partie du budget temps de cette catégorie avec pour les Alpes-Maritimes, un pourcentage temps de méthodologie très nettement supérieur A celui des autres centres ; 
- les notes de lecture font partie des activités menées A Grenoble et Roubaix, mais pas dans les Alpes-Maritimes ; 
- l'objet livre est "étudié" dans les trois centres ; 
- l'objet presse fait aussi partie des activités d'enseignement A Grenoble, pour un des séjour observé (projet).Grenoble est le centre qui laisse le plus de temps pour les activités B.C.D. 

Les activités d'écriture arrivent enfin en troisième position :S'il n'est pas question de Grenoble dans les lignes qui suivent c'est qu'ils n'ont noté aucune activité d'écriture pour les séjours observés.- Jeux et exercices sont uniquement sous la forme d'activités de systématisation dans les Alpes-Maritimes et le budget temps qui leur est imparti est comparable aux activités de bibliothéconomie, ELMO et texte long. En ce qui concerne le centre de Roubaix, une place plus grande est laissée A la systématisation et A la théorisation. Un peu de méthodologie se glisse dans ces activités jeux/exercices. 
- la réécriture : sous ce mot il existe des pratiques bien différentes qui vont du toilettage A l'écriture de la lecture du réécriveur ! 
A l'issue de cette observation des activités d'enseignement, on peut, malgré la diversité pratiques d'un centre A l'autre, réaffirmer un principe commun qui est aussi une ligne de force de cette entreprise particulière de formation des adultes A travers les enfants. Ce qui frappe en effet, c'est A la fois la diversité de ce qui est proposé et l'importance dans l'emploi du temps que prend ce travail méthodique. Les classes-lecture réagissent ainsi A un certain vide pédagogique qui suit parfois le stress du cours préparatoire. Si la rencontre de l'écrit est un apprentissage continu, encore faut-il donner un contenu au-delA de l'alphabétisation initiale. Certes, on a vu se développer les BCD mais davantage comme des lieux de proximité pour emprunter des ouvrages ou faire des enquêtes documentaires que comme lieu d'une observation méthodique de la production écrite. On mise sur une exhortation A la lecture, y compris en utilisant des concours et des parcours en méconnaissant que le fameux plaisir de lire n'a rien de naturel pour la majorité des enfants qui n'en voient guère l'exemple dans leur environnement familial et social. Pour la majorité des élèves, le plaisir n'est pas un point de départ mais un point d'arrivée vers lequel il faut construire opiniâtrement un chemin et non miser sur de miraculeuses conversions. Pour devenir ensuite affaire de goût, la lecture doit se construire dans la nécessité d'un programme qui allie le développement d'indispensables compétences techniques A la découverte guidée de territoires innombrables. De même pour l'apprentissage de cette nouvelle manière de penser qu'est l'écriture.  

L'OBSERVATION DES ECRITS L'observation des écrits reçus dans le cadre de ce chapitre doit permettre d'appréhender quelle approche de l'écrit développe chacun des trois centres ayant envoyé des écrits, au-delA des hypothèses de travail, voire des positions de principe qu'ils peuvent avoir émises.Si l'écrit est envisagé majoritairement dans l'éducation nationale et dans l'esprit de la plupart des gens comme le moyen de transcrire une pensée préalablement élaborée A l'oral, comme un moyen de conservation et de communication de cette pensée et comme un moyen d'expression (les mots clés se répartissent entre rédaction et expression écrite), en quoi les centres de classes-lecture/écriture peuvent-ils être porteur d'une recherche permanente et d'une autre approche de l'écrit ? 

Les auteurs analysent ces écrits, longuement, tout au long des chapitres consacrés A ce thème. Ils notent alors, selon le centre : 

...Une représentation différente de l'écritIl semble qu'on se trouve devant deux conceptions de l'écrit, l'une que partagent sur l'essentiel les centres de Grenoble et des Alpes-Maritimes, l'autre que fait fonctionner le centre de Roubaix. 

Pour Grenoble et les Alpes-MaritimesL'écrit semble être conçu comme un outil pour penser et être plus du côté de la transformation que de l'expression. C'est un outil de réflexion, de compréhension donc de transformation de la réalité pour les élèves et les adultes qui partagent le projet des enseignants de la classe-lecture. Dans ses intentions, le centre de Grenoble écrit : "le circuit court :- pour faire en sorte que les enfants aient éprouvé par et pour eux-mêmes que lire et écrire aident A vivre ; 
- pour permettre une réaction ou un retour rapide sur un problème soulevé ; 
- pour que les enfants expérimentent la puissance de l'écrit par les polémiques qui peuvent naître de leurs écrits... Ils rédigeront le plus souvent individuellement un texte qui : 
- développe leurs arguments et met en avant leur point de vue, sur une problématique discutée ; 
- leur permet de faire le point sur leurs idées ; 
- pose un nouveau problème, une question qui leur tient A cœur et qui n'a pas encore été débattue".Le centre des Alpes-Maritimes précise : "Pour que les enfants puissent découvrir la fonction majeure de l'écrit, il faut que ce dernier repose sur une réalité effectivement vécue. L'écrit n'est important que parce qu'il interprète le monde grâce A un langage qui, comme instrument, impose par sa nature même des contraintes particulières qui obligent A un traitement, une transposition, au choix d une perspective : et c'est cette interprétation que recherche le lecteur ; ce qui est d'ailleurs tellement intéressant !". 

Mais, malgré des hypothèses de travail, voire des positions de principe similaires, les centres de Grenoble et des Alpes Maritimes ont mis en place des dispositifs différents et, A l'exception de ceux qui concernent les apprentissages, ils ne publient pas toujours le même type de textes. 

Dans les classes-lecture des Alpes Maritimes, tous les textes produits par les enfants sont publiés mais dans des supports différents (Tapage, Tap' boîte, Drôl' d'histoire et Tapage spécial réécriture) et ne subissent pas le même traitement (réécriture adultes dans Tapage, correction et mise en forme dans Tap boîte et Drôl' d'histoire, réécriture enfants dans Tapage spécial réécriture). Dans le centre classe-lecture de Grenoble, tous les textes ne sont pas publiés (un comité de rédaction adultes choisit les textes qui seront publiés). 

Pour Grenoble, la plupart des textes semblent rythmer une réflexion sur des questions de vie quotidienne dont certains points auraient pu être résolus A l'oral (lors de réunion coopérative par exemple). Mais, A suivre certains textes qui se font écho entre eux, on s'aperçoit que l'écrit permet A certains de prendre de la distance et d'avancer dans la réflexion autrement que si elle avait été conduite uniquement A l'oral (cf. les textes sur les délégués). Un lecteur externe A la parution de La Chronique ne peut guère entrer dans les raisons et les intentions des auteurs de certains textes. Tel n'est pas de toute façon le but de La Chronique. 

Il en est de même pour les textes de Tapage mais A un autre niveau. En effet, la plupart d'entre eux peuvent être lus par des lecteurs externes aux séjours. Certaines intentions d'auteurs peuvent même être appréhendées. Mais, il existe pour la majorité d'entre eux un niveau de lecture qui ne peut être perçu que par les participants de la classe-lecture. L'implicite qui renvoie A un événement, un autre article, un débat qui a suscité l'écrit exclut les lecteurs extérieurs des véritables intentions de l'écriture. L'importance, également, du contexte culturel commun qui se crée peu A peu pour les participants, les références "livresques" (au niveau des écritures, des thèmes, des personnages) permettent d'autres lectures qui échappent aux lecteurs extérieurs du groupe (on s'aperçoit peu A peu que les activités qui sont présentées lors des séjours tissent entre elles des fils qui font que les apprentissages ne prennent de sens que dans une globalité et non dans une parcellarisation). Certains de ces écrits publiés (écrits d'adultes A partir de textes d'enfants ou textes d'enfants réécrits par des adultes) semblent vouloir entraîner les enfants sur le chemin du "structurel" pour quitter celui du "conjoncturel".En bref, les écrits produits dans ces deux centres semblent vouloir se débarrasser de l'orientation scolaire de l'apprentissage de l'écrit pour replacer celui-ci dans une réflexion sur son propre rôle. 

Pour Roubaix. Les écrits produits A Roubaix, dans le cadre des projets, visent d'autres objectifs : ils semblent répondre A une typologie séquentielle comme celle d'Adam et se proposent d'aider les enfants A en dégager des règles de fonctionnement qu'il s'agira pour eux de reproduire (narratif, descriptif, poétique, etc.). Si pour les questions écrites pour le Trivial Poursuit, on peut définir des lecteurs potentiels, il n'en est pas de même pour RouleTaBille. 

On sent bien que l'écrit n'a pas la même fonction que dans les deux centres précédents. Paradoxalement, on pourrait dire qu'il est davantage utilisé ici pour produire de 1 écrit alors qu A Grenoble ou dans les Alpes-Maritimes, on invite A s'en servir pour exercer une sorte de raison graphique, un mode de pensée que l'écrit produit plutôt qu'il ne produit de l'écrit ; et sans doute que dans ces deux centres, tout converge, aussi bien en lecture qu'en écriture, vers cette découverte d'un autre statut de l'écrit alors qu'A Roubaix (et sans doute A Dunkerque, bien que les productions n'aient pas été présentées ici), on se préoccupe méthodiquement de faire acquérir un usage de l'écrit dont on ne remet pas en cause, hormis l'exigence de qualité, la fonction. 

Nous avons cité ici des extraits du rapport en nous efforçant de suivre le plan suivi. Nous terminons la présentation de ce rapport par une transcription intégrale de sa conclusion.   

SYNTHESE
Cette description de quatre centres de classes-lecture qui se sont auto-observés pendant une année A partir d'outils élaborés en commun ne saurait déboucher sur une généralisation et encore moins sur l'ébauche d'un modèle. En revanche, elle permet de dégager une problématique de questionnement pour les centres qui se créent afin que leurs options soient plus délibérément choisies que subies. On constate en premier lieu des principes organisationnels communs : un encadrement permanent et expérimenté, des technologies modernes faisant largement appel A l'informatique, un incontestable intérêt pour la littérature de jeunesse, notamment A travers la BCD, une centration importante sur les questions de production de textes. Ce qui ressort ensuite très fortement, c'est qu'il s'agit sans équivoque d'un dispositif de formation d'adultes, certes A l'occasion d'un travail réel et d'une notable durée avec les enfants mais entièrement conçu pour sa reprise avec les adultes. Il ne s'agit pour personne d'ajouter au cursus scolaire des enfants quelque stage spécialisé que ce soit qui leur donnerait une hypothétique bonne mine de lecteur mais bien d'agir indirectement sur le fonctionnement ordinaire de l'institution solaire, notamment aux cycles 2 et 3, pour faire évoluer durablement au quotidien les pratiques dans la rencontre de l'écrit. 

Cette formation des adultes a pris clairement le parti de l'apprentissage sur le modèle des ateliers de peintre ou de menuiserie : les enfants sont pris en main de manière permanente par les "maîtres de stage" et les enseignants sont invités A prendre du recul pour observer ce fonctionnement différent avec des élèves qu'ils connaissent. Ils sont ensuite progressivement réimpliqués dans ce nouveau contexte avec un appui technique et des investissements théoriques. Cette formation cherche néanmoins A s'inscrire dans la continuité des classes accueillies et non A substituer une logique A une autre. C'est pourquoi, les temps de négociation préalable et de suivi jouent un rôle important pour une opération dont le succès dépend de la capacité du dispositif de formation de faire vivre l'innovation la plus audacieuse mais néanmoins respectueuse de l'expérience et de la réalité des professionnels accueillis.A partir de ces points communs qui fondent une réelle spécificité des centres de classes-lecture, on peut observer des diversifications A partir de quelques grandes questions. 

Un premier axe concerne la nature du groupe d'adultes qui est l'objet réel de l'entreprise de formation. A une extrémité, ce groupe est réduit au seul enseignant de la classe. Il peut s'élargir aux parents, A d'autres intervenants dans l'école (BCD) ou proches de l'école (aide aux devoirs), A des acteurs du quartier. A l'autre extrémité, on rencontre la volonté d'une ville lecture de mettre en formation une équipe intervenant dans une politique de lecture dont les enseignants ne sont pas les seuls garants, même si c'est l'école qui sert de point d'appui. En quelque sorte, cet axe serait assez bien celui de la déscolarisation de la lecture et de la manière dont un centre de classes-lecture est au service d'un projet strictement scolaire ou, A l'opposé, d'un projet communautaire. 

Un deuxième axe concerne la nature de la commande au sein de l'école. S'agit-il de la formation individuelle d'un enseignant pour sa classe ou d'une formation mandatée (même s'il n'y a qu'un enseignant effectivement présent) par un groupe d'enseignants dans l'école ayant un projet collectif (organiser des cycles, l'hétérogénéité, faire fonctionner la BCD, s'ouvrir sur l'extérieur, etc.) ? En quelque sorte, cet axe traduit la manière dont un centre de classes-lecture travaille au niveau de l'organisation générale et du projet d'école ou des unités classes et de leur juxtaposition. 

Un troisième axe concerne le rôle du projet dans l'organisation pédagogique. On retrouve lA l'opposition entre une approche méthodique par investissements disciplinaires où le projet sert A la fois de mise en îuvre et de motivation et une approche centrée sur une production réelle dont la théorisation des processus de production conduit A une analyse méthodologique et A des constructions systématiques. En quelque sorte, cet axe oppose une conception du projet, d'une part, comme lieu de contextualisation de savoirs disciplinaires enseignés en tant que tels et, d'autre part, comme source d'une décontextualisation de processus intellectuels productifs pour lesquels le retour réflexif permet une construction théorique qui se structure progressivement en savoirs disciplinaires. 

Un quatrième axe concerne la conception de l'apprentissage individuel dans son rapport au social et A l'hétérogénéité. On en trouve un bon exemple dans les questions que ne manque pas de poser la réécriture lorsqu'il s'agit de produire un journal correspondant A des usages sociaux convenus. L'élève apprend-il parce qu'il est associé A la réalisation de quelque chose dont la complexité le dépasse mais où ses apports vont être repris et transformés ou, A l'inverse, est-il invité A réaliser un produit qui correspond A ce qu'il est capable de réussir mais dont l'enjeu social est alors moins important que le but pédagogique ? En quelque sorte, cet axe développe un autre aspect des projets avec, d'un côté, une recherche d'autonomie immédiate qui enferme l'enfant dans son statut et, de l'autre, une recherche de fonctionnalité qui associe l'enfant A une production collective. 

On voit bien A travers ces quatre axes qui, au-delA d'un socle commun, contribuent A spécifier l'originalité de chaque lieu que la création d'un centre de classes-lecture et le choix de ses principes de fonctionnement témoignent finalement de conceptions très fondamentales de l'éducation et de la cité, de l'école et de l'enseignement, de l'enfant et de l'apprentissage. En ce sens, les centres se différencient les uns des autres sans doute moins sur des positions par rapport A l'écrit et A la lecture que sur des orientations de pédagogie générale. Autant le savoir... 
 

 
Jean-Pierre Bénichou 
 
1 I1 ne s'agit pourtant pas d'une démarche " productiviste ". L'achèvement du produit est certes important mais son processus de production est l'occasion de faire émerger de nombreuses situations-problèmes dans le domaine du lire/écrire, situations propices A des apprentissages transférables A d'autres projets 14/15