La revue de l'AFL

Les actes de lecture   n°67 septembre 1999

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A UN COUP POUR RIEN

On lira ci-après une note critique de Jacques Fijalkow (CREFI – Université de Toulouse-le Mirail) sur le livre de l’Observatoire National de la Lecture : Apprendre A lire au cycle des apprentissages fondamentaux (GS., CP, CE1). Analyses, réflexions et propositions, Odile Jacob, 1998  

 
La dernière publication de l'Observatoire national de la lecture (ONL) se présente sous la forme agréable d'un petit ouvrage au format de poche, A la couverture blanche et glacée, et de longueur raisonnable (224 pages au total). Son titre de couverture, court et familier ("Apprendre A lire"), indique sa volonté d'accessibilité. Titre limitatif néanmoins puisque la lecture de l'ouvrage montre que les auteurs ne s'intéressent pas seulement A la lecture mais aussi bien A l'écriture, que leur réflexion, bien que partie de l'apprentissage, concerne également l'enseignement, et enfin que même si ce sont les tout débuts de l'entrée dans l'écrit qui sont visés principalement, ce qui se passe au delA du cycle 2 entre aussi dans leur champ de préoccupation. En dépit de l'évidente volonté de lisibilité qui anime les rédacteurs, on ne trouvera pourtant pas d'index des notions, ni d'index des noms propres, ni même de bibliographie finale, les références bibliographiques apparaissant uniquement sous forme de notes de bas de page. C'est regrettable car, faute de ces aides, le lecteur doit donc se contenter d'une lecture ordinaire, linéaire ou aléatoire. Il se trouve privé des plongées ponctuelles que permettent les index ou du rapide survol bibliographique qui aide A se faire rapidement une idée de l'ouvrage. A cette fin, il dispose toutefois des Recommandations de l'ONL (pp. 211-214), qui nous apparaissent comme la quintessence des idées développées tout au long de l'ouvrage et dont nous lui conseillerons donc de prendre connaissance en premier.

Si la couverture ne porte, sobrement, que l'indication "Observatoire national de la lecture", la page intérieure précise qu'il s'agit d'un "ouvrage collectif dirigé par José Morais et Guy Robillart, avec la collaboration de... (suivent 12 noms)". L'Observatoire national de la lecture, on s'en souvient, a été mis sur pied par un précédent ministre de l'Éducation Nationale (François Bayrou). Ses membres ne sont ni élus ni cooptés mais nommés. La liste des membres actuels, ainsi que la définition des missions de l'ONL, figurent en fin de volume. Cette liste, régulièrement indiquée dans les publications de l'ONL, permettra au lecteur curieux de constater, d'une part, que certains membres, auteurs d'une publication antérieure (ONL,1996), ne figurent plus dans la liste actuelle (Philippe Meirieu, Jean-Pierre Jaffré), tandis que d'autres y apparaissent (Jean Hébrard), et que, d'autre part, la liste des membres actuels ne coïncide pas totalement avec la liste des signataires de cette publication ; en particulier, Jean Foucambert n'a pas signé ce texte, ce dont on ne s'étonnera pas en prenant connaissance du contenu du livre.

On remarquera aussi que les deux directeurs proviennent respectivement de la recherche psycholinguistique (José Morais) et de l'Inspection générale (Guy Robillart). Les chercheurs signataires sont essentiellement des chercheurs en psychologie, en sciences pures et sciences du langage, mais n'y figurent ni chercheur en sciences sociales (histoire, sociologie, ethnographie, sciences de l'éducation...), ni spécialiste de la didactique du français premier degré. La liste des collaborateurs fait apparaître en outre des représentants de l'Inspection
générale, des praticiens, et des représentants des associations de parents d'élèves. Ceci confirmant cela, les praticiens retenus relèvent de l'éducation et de la rééducation (un instituteur et une orthophoniste), mais on ne trouve ni représentant des praticiens du livre (éditeur, bibliothécaire, libraire...), ni des associations de lutte contre l'échec scolaire. Les choix ainsi opérés, situent donc la lecture, d'une part du côté des secteurs de la recherche et de la profession les moins intéressés par les pratiques sociales et par les contextes dans lesquels la lecture fait problème et, d'autre part, du côté de l'autorité administrative. Les orientations prises tout au long de l'ouvrage en porteront la marque.

Cet ouvrage se propose, comme l'indique la préface rédigée par Jacques Friedel, Président de l'ONL, de faire le point des connaissances relatives A l'apprentissage de la lecture et de faire suivre cet énoncé de «suggestions visant A mieux éclairer dans leurs choix les enseignants comme les parents et également les pouvoirs publics.» La suite de l'ouvrage montrera au lecteur que, en pratique, le lectorat visé est essentiellement celui des maîtres. Un ouvrage complémentaire est annoncé, centré sur l'enseignement. Cet ouvrage-ci se présente donc
principalement comme apportant «les données issues de la recherche scientifique». La logique classique, qui va de la recherche dite "fondamentale" aux "applications pratiques", est donc marquée dès le départ. Elle ne sera jamais nuancée ni discutée, tant elle paraît aller de soi aux auteurs. Que cette logique ne fonctionne A peu près jamais dans le champ des sciences humaines et sociales (SHS) en général, et dans celui de l'éducation tout particulièrement, et qu'elle soit vigoureusement récusée tant par les mouvements pédagogiques, unanimes pour refuser toute démarche "applicationniste", que par les chercheurs en didactique soucieux de validation empirique des propositions didactiques, d'où qu'elles proviennent, échappe manifestement aux auteurs. C'est pourquoi l'énoncé des résultats des recherches, linguistiques ou psycholinguistiques le plus souvent, sera imperturbablement suivi de recommandations d'ordre pédagogique découlant directement de celles-ci, sans nul souci de vérification empirique de leur validité dans le champ scolaire.
 

CONTENU

Organisation
Discernant mieux ce qui constitue la matière de l'ouvrage, ce que sont ses rédacteurs, A qui il est destiné, et dans quelle démarche praxéologique il s'inscrit, la logique qui préside au choix des cinq chapitres apparaît alors dans tout sa cohérence. Nous en indiquerons la teneur rapidement (l'avant-propos en rend compte fidèlement) parce que leur matière a fait l'objet de tant de présentations au cours des dix dernières années de la part des principaux auteurs (largement auto-référencés dans les notes) qu'il nous paraît préférable d'utiliser la place dont nous disposons pour en discuter les thèses plutôt que pour les présenter largement.

Le chapitre premier, intitulé Avant le CP : une maîtrise de la langue plus justement partagée, peu technique, présente brièvement (treize pages) un certain nombre de principes et d'objectifs qui seront développés ou explicités par la suite.

Le chapitre deux, plus étoffé (quarante pages), est consacré spécifiquement A l'identification des mots écrits. C'est sans nul doute le chapitre le plus important puisque, centré sur le cycle deux, il est consacré A la présentation de la thèse principale de l'ouvrage. Son contenu, bien que essentiellement psycholinguistique, ne devrait pas rebuter le lecteur, même peu familier
de ce type de recherches, du fait des efforts effectués en terme de lisibilité.

Le chapitre trois, Compétences morphosyntaxiques et lecture de textes, présente la suite de l'apprentissage en un nombre de pages équivalent (trente six), mais l'accent est mis davantage sur les aspects linguistiques que psycholinguistiques, compte tenu sans doute du moindre nombre de recherches psycholinguistiques consacrées A la poursuite de l'apprentissage qu'A ses débuts.

Un bref chapitre quatre (vingt pages) présente L'accompagnement de l'apprentissage de la lecture. On y trouve, dans l'ordre, des développements relatifs A «l’envie d’apprendre», aux parents, «A la prise en compte de la diversité des élèves», A «la collaboration entre les pairs» et au «tutorat», A «l'aide apportée par le travail sur l'ordinateur», c'est-A-dire un ensemble de questions qui, exception faite de la dernière, échappent A l'expertise linguistique-psycholinguistique et avec lesquelles, A l'évidence, les auteurs se sentent moins A l'aise. Classiquement, l'ouvrage se termine par un long chapitre (cinquante cinq pages) consacré aux Difficultés d'apprentissage de la lecture, dont la précision et l'actualité de l'information ravira ceux (dont nous sommes) qui s'intéressent A cet aspect de la question, mais rebutera sans doute la plupart des lecteurs non concernés spécifiquement par ce type d'élèves. Ainsi donc, des principes et objectifs généraux aux premiers temps de l'apprentissage, puis de la poursuite de celui-ci A l'évocation de certains aspects affectifs et sociaux, et, pour finir, aux difficultés d'apprentissage, un tour d'ensemble est réalisé de ce que les auteurs appellent «apprendre A lire» : le chapitre un est d'intérêt général, les deux autres suivent la chronologie de l'apprentissage, le suivant évoque les aspects affectifs et sociaux, dès lors jugés secondaires par rapport aux facteurs psycholinguistiques selon cette perspective, et le dernier s'intéresse A ceux qui restent, les enfants qui n'ont pas été en mesure de suivre ce processus. Dans une autre perspective théorique, un ordre A peu près inverse aurait pu être proposé.

Thèse principale
La thèse principale, celle qui constitue la clé de voûte théorique du livre, est que l'apprentissage de la lecture ne peut se comprendre, sur le plan de l’objet, que par référence A la phonologie. Sur le plan du sujet, ceci signifie que la conscience phonique, c'est-A-dire la capacité plus ou moins développée qu'a un enfant d'opérer une analyse de l'oral en ses unités constitutives, joue un rôle littéralement fondamental dans cet apprentissage. C'est, par conséquent, la découverte du principe alphabétique par l'enfant qui constitue l'événement fondateur de l'apprentissage, celui A partir duquel l'enseignement pourra s'effectuer.

Pour les auteurs, cet enseignement doit être d'abord et exclusivement celui du code, c'est-A-dire des correspondances grapho-phonétiques, si l'on pense A la lecture, et des correspondances phono-graphiques, si l'on pense A l'écriture. Mais il ne peut être efficace que si l'enfant a compris le principe alphabétique, ce qui confère donc A cette découverte le statut de condition de l'apprentissage. Suivant cette thèse, que l'on peut qualifier de "phonographiste", c'est donc aux habiletés phonologiques que sera renvoyée systématiquement toute question relative A l'apprentissage, qu'il s'agisse de prédire le niveau de compréhension de lecture (p,169) ou d'expliquer les difficultés d'apprentissage, sur un mode général (p.201) ou, de façon plus précise, sur les plans, par exemple, morphologique
(p.185) ou orthographique (p.196). Le schéma (p.200) qui résume cette conception met d'ailleurs en position centrale un supposé "déficit phonologique". La phonologie, ou plus précisément, la conscience phonologique, apparaît donc comme le deus ex machina de l'apprentissage de la langue écrite.

Cette façon de voir ne constitue sans doute pas une révélation didactique bouleversante pour qui que ce soit, pour la bonne et simple raison qu'elle est celle du sens commun, façonnée par quelques cinq mille ans d'enseignement de la lecture reposant sur ce principe (Marrou, 1948).
L'originalité de la thèse n'est donc pas A chercher sur le plan didactique mais plutôt dans la nature des arguments employés pour la défendre, arguments tirés de la recherche psycholinguistique principalement. Ainsi donc, si, sur le plan didactique, le principe défendu est d'une totale banalité, il n'en est pas de même sur le plan psycholinguistique où la notion de découverte du principe alphabétique et l'accent mis sur la conscience phonétique constituent des aspects nouveaux pour la réflexion commune sur la lecture. Ainsi, pour les auteurs, et sur la base des recherches présentées, la manière classique d'enseigner la lecture est scientifiquement et définitivement fondée. Le débat sur la lecture est clos. Ce point de vue nous paraît tout A fait discutable.

A nous en tenir A la question de la conscience phonique, bien documentée du fait de la multitude de recherches effectuées, il est regrettable que les auteurs ne fassent apparaître que les recherches montrant que les progrès de l'apprentissage sont fonction du degré de conscience phonique des enfants. Pour compléter l'information du lecteur, signalons alors qu'il existe aussi des recherches qui, en sens inverse, mettent en évidence que le degré de conscience phonique est fonction des progrès dans l'apprentissage de la lecture. Ce fait, bien évidemment, remet en cause toute l'argumentation rappelée ci-dessus. La vérité est que, comme souvent dans les SHS, il est A peu près impossible d'établir des relations simples de causalité, objectif auquel d'ailleurs les sciences plus avancées ont renoncé. Dans le cas présent, une hypothèse plus réaliste consisterait A considérer que la corrélation entre conscience phonique et apprentissage de la lecture n'est ni directe ni inverse mais réciproque : un certain degré de conscience phonique permettrait certaines acquisitions, et ces acquisitions permettraient A leur tour un certain développement de la conscience phonique. Peut être le problème posé ici n'est-il donc qu'une nouvelle version de la poule et de l'oeuf.

Signalons aussi, dans le même souci de compléter l'information fournie par l'ouvrage, que la notion de conscience phonique, loin de faire l'unanimité des chercheurs, comme pourrait le laisser croire une présentation trop unilatérale A notre sens des recherches, est, au contraire, très discutée dans la communauté scientifique, et précisément par les chercheurs oeuvrant le courant dont les recherches présentées dans ce livre sont issues. C'est ainsi qu'un numéro A paraître de Reading Research Quarterly (1999, 34, 1), revue américaine souvent citée dans l'ouvrage, comporte un article analysant 39 recherches présentant des interventions relatives A la conscience phonique. On appelle interventions, rappelons-le, les expériences au sein desquelles un enseignement est effectué en vue d'évaluer les effets d'une variable, ici la conscience phonique, sur les comportements des sujets, ici les enfants. Cet article, extrêmement exigeant sur le plan méthodologique, conclut que seules sept études satisfont A au moins deux tiers de la totalité des critères d'évaluation retenus par les rédacteurs de l'article, mais que toutes présentent néanmoins au moins un défaut rédhibitoire. Ajoutons également que le principal périodique de Grande Bretagne pour la lecture, le Journal of Research in Reading, vient de publier un numéro spécial (1998, 21, 3) consacré A un débat entre chercheurs favorables ou critiques vis-A-vis de la conscience phonique. Le lecteur francophone intéressé par cette question trouvera dans un récent numéro de Les actes de lecture la traduction d'un texte d'un chercheur américain faisant une mise au point critique A ce sujet (Scholes, 1998). S'engager aussi vigoureusement que le font les auteurs de l'ouvrage analysé dans une telle défense et illustration de la conscience phonique nous paraît donc être une attitude scientifiquement peu prudente et pédagogiquement aventureuse.

Ajoutons enfin, puisque cette question nous paraît bien plus ouverte que la lecture de l'ouvrage analysé n'invite A le croire, une autre hypothèse, qui demeure A explorer. Dans une perspective didactique en effet, poser la conscience phonique comme la condition absolue de tout apprentissage de la lecture c'est raisonner comme si l'apprentissage se déroulait dans un vide didactique, c'est-A-dire était le même quelle que soit la manière dont l'écrit est présenté aux enfants. C'est faire preuve de psychologisme. Pourtant, sachant que le matériel didactique courant consiste A faire mettre en relation des lettres et des phonèmes, on peut raisonnablement supposer que ce fait ne saurait être sans effet sur la façon dont se déroule l'apprentissage. En d'autres termes, si la conscience phonique est autant liée A l'apprentissage, c'est peut être précisément parce que les pratiques didactiques courantes reposent sur une base phonique. Mais rien ne permet de penser que son rôle serait tel si le matériel et les pratiques didactiques n'étaient pas structurées sur une base phonique. Les recherches manquent permettant de savoir comment s'effectue l'apprentissage dans des contextes où les correspondances grapho-phonétiques n'occupent pas la place privilégiée qui est généralement la leur, mais on peut poser l'hypothèse qu'il ne se déroule pas alors de manière identique et, en particulier, 1) que la conscience phonique n'y a pas la même importance, et 2) que d'autres facteurs que celle-ci interviennent. Ainsi, suivant cette hypothèse, la conscience phonique n'est la clé de voûte de l'apprentissage de la lecture que quand l'enseignement repose sur la capacité de l'enfant A segmenter l'oral en phonèmes.

En bref, pour une vue plus complète et plus précise sur cette question que celle que présente l'ouvrage analysé, il nous paraît nécessaire de considérer tout d'abord la conscience phonique non pas comme un absolu psychologique mais comme un facteur étroitement lié A la démarche didactique, A la fois parce que celle-ci apparaît contribuer A son développement, et parce que, sous sa forme la plus courante, elle en présuppose l'existence. Une tâche prioritaire de la recherche nous paraît donc aujourd'hui d'examiner l'apprentissage de la lecture dans d'autres contextes didactiques que les contextes courants dominés par la conception
phonographiste de la lecture, afin d'identifier les facteurs qui, en plus de la phonologie, mais non pas A la place de celle-ci, permettent A l'enfant de mener A bien son apprentissage. Toute l'histoire des sciences amène A penser que la réduction A un facteur unique ne peut permettre de rendre compte de la complexité des phénomènes étudiés. L'apprentissage de la
lecture ne saurait faire exception.

Autres positions théoriques
Outre la position phonographiste adoptée dans cet ouvrage, bien d'autres positions théoriques nous paraissent mériter discussion. Ainsi, par exemple, de la focalisation sur l'unité mot, au point qu'un chapitre entier est consacré A l'identification des mots, celle-ci étant explicitement considérée comme le coeur de la lecture. La linguistique moderne s'est construite contre la conception naïve qui conçoit la langue comme un ensemble de mots (Cf. la représentation courante du dictionnaire comme l'outil de référence par excellence) et invite A la considérer plutôt comme une structure combinant des unités de différents niveaux. Pour le linguiste, le mot n'est d'ailleurs pas une unité d'oral et n'est guère considéré A l'écrit. Ce n'est donc pas sur une base linguistique que le mot mérite la place qui lui est attribuée ici. Par ailleurs, un bref coup d'oeil sur l'histoire de l'enseignement de la lecture montre que celui-ci a privilégié des unités différentes et variables dans le temps. La syllabe a eu son heure de gloire, tout comme la lettre. Si l'on se demande alors pourquoi certains aujourd'hui ont tendance A considérer le mot comme l'unité-lecture par excellence, il convient de se référer A une autre histoire, celle de la psychologie expérimentale, dans la tradition de laquelle, et la psychologie de la lecture présentée ici en procède, le mot est l'unité privilégiée, notamment dans les expériences de perception des mots au tachistoscope. Mais ce qu'une tradition peut expliquer dans un domaine est évidemment sans rapport avec sa validité dans un autre domaine. Ainsi, quelles que soient les sources, banales ou disciplinaires, de cette focalisation sur le mot, il nous paraît y avoir un certain arbitraire A le considérer comme l'unité lecturale par excellence. Les pédagogues, enfin, connaissent bien le danger qu'il y a A privilégier l'identification des mots dans l'enseignement de la lecture : celui de transformer la lecture en une suite d'identifications successives produisant un effet pénible de lecture hachée et faisant obstacle A la compréhension générale du texte. Mais, pour mieux comprendre la faveur dont jouit le mot, sans doute faut-il faire un pas de plus et évoquer la défaveur qui enveloppe la notion de contexte dans cet ouvrage.

Dans la perspective adoptée par les auteurs en effet, sachant que celle-ci exclut le contexte comme support de sens en début d'apprentissage, mais est consciente néanmoins qu'une position excluant toute signification ne serait pas recevable par les pédagogues, le mot apparaît alors comme une unité acceptable. Etant de plus une unité petite et donc plus maîtrisable expérimentalement, elle peut être alors l'unité capable de remplacer le contexte dans une fonction de signification (p.44). En effet, suivant la présentation qui en est faite dans ce livre, le contexte n'est utilisé que quand l'enfant ne peut pas faire autrement, c'est-A-dire ne sait pas décoder, A savoir en début d'apprentissage, est un enfant en difficulté, ou soumis A un enseignement non phonique (pp.102-103), ceci expliquant cela. Le recours au contexte est donc présenté comme la stratégie du pauvre, une source d'«hypothèses mal maîtrisées» (p.119), une «base fragile d'indices très partiellement reconnus» (p.166), au fond une stratégie compensatoire A l'incapacité de décoder un mot ou de le reconnaître A partir de son seul graphisme quand le processus de décodage a été automatisé.

S'il existe de nombreux faits expérimentaux susceptibles d'étayer cette conception minorante du rôle du contexte, il existe également des recherches qui lui attribuent un rôle constructif, ce qui amène donc A considérer que la question du contexte n'est pas une question résolue mais demeure bel et bien ouverte. On trouvera, par exemple, dans un numéro A paraître de l'Actualité de la Recherche Internationale en Sciences de l'Éducation (1999,1), deux recherches empiriques réalisées en France dans des CP par Roland Goigoux et Serge Ragano respectivement, qui permettent de considérer le contexte non pas comme une sorte de substitut juvénile au décodage, comme une vision trop manichéenne de la lecture invite A le penser, mais comme un des moyens dont les enfants disposent tout au long de leur apprentissage et dont ils se servent pour réaliser celui-ci. Ajoutons, pour ce qui concerne les recherches psycholinguistiques dont ce livre fournit maints exemples, qu'il existe aussi une raison technique A la sous-estimation du rôle du contexte dans la lecture. Nombre des recherches présentées dans ce livre et qui portent sur les débuts de l'apprentissage de la lecture, utilisent des mots réguliers vs irréguliers, des mots vs des pseudo-mots, des homophones, des pseudo-homophones, etc., c'est-A-dire un matériel verbal dont la longueur ne dépasse pas le plus souvent le plafond du mot ; ces unités sont, de plus, présentées sans contexte phrastique et a fortiori textuel. On ne saurait s'étonner dès lors que le rôle du contexte n'apparaisse pas de manière éclatante dans les conclusions issues de ces recherches.

Outre la minimisation du rôle du contexte dans l'apprentissage de la lecture A laquelle conduit une méthodologie qui l'exclut d'emblée, l'usage massif de situations où l'objet A lire est réduit A des unités aussi courtes et pauvres que possible, pose enfin une question cruciale, celle de la validité écologique des conclusions produites dans les laboratoires procédant de la sorte. Ce qui importe en effet au pédagogue, c'est la lecture de textes par les enfants et non pas la lecture de mots isolés ou de pseudo-mots. Or rien ne permet d'affirmer que ce qui se passe dans un cas vaille pour l'autre, hormis l'affirmation de ceux qui le pensent. La question de la validité pour la lecture d'écrits longs et complexes d'expériences portant sur la lecture d'unités artificiellement isolées en laboratoire est une question difficile. Elle s'inscrit dans le cadre plus général de la validité sur le terrain des conclusions des travaux de laboratoire et se pose A la psychologie de laboratoire, pour la lecture comme pour tout autre objet.

La conception qu'ont les auteurs de la lecture est un autre point qui mérite discussion. On retrouve en effet dans cet ouvrage (p.157) un raisonnement qui présente la lecture (L) comme le produit du décodage (D) et de la compréhension (C) : L = D x C. Si l'on accepte cette équation, et si l'on admet par ailleurs que la compréhension est la même A l'écrit et A l'oral, alors le seul facteur spécifique de la lecture est le décodage. Ainsi, lire, c'est décoder (p.172). Ce raisonnement, qui a la force de conviction des idées simples, ne nous paraît pourtant pas avoir le caractère d'évidence qu'il a pour les auteurs d'un courant dont on reconnaît bien ici ce qu'il doit A sa filiation béhavioriste. De la psychologie S-R A la lecture D-C, on perçoit aisément la continuité d'une épistémologie tendant A réduire la complexité du réel A une expression aussi simple possible, A l'opposé d'une conception de la science comme volonté de rendre compte de la complexité des choses par une pluralité de facteurs et de relations. Reprenant alors chacun des termes de cette équation, on peut pourtant mettre en doute son caractère d'évidence.

La compréhension, d'une part, n'est la même A l'écrit et A l'oral que si on ne prend pas en considération que, concrètement, dans la vie sociale, ce qui s'écrit ne se dit pas et ce qui se dit ne s'écrit pas, A l'exception de quelques rares situations de type professionnel telles que la lecture d'un prompteur par un journaliste, d'un dialogue de théâtre par un comédien ou d'un cours magistral par un professeur. L'oral et l'écrit, comme la sociolinguistique l'a amplement démontré, correspondent A des situations de production si différentes que les productions linguistiques correspondantes sont autres. De ceci résulte que la comparaison de la compréhension de l'oral et de l'écrit telle que rapportée ci-dessus n'a guère de sens, exception faite des types de cas indiqués ou de conditions de laboratoire artificielles, dont on peut craindre A nouveau qu'elles ne créent leur objet plutôt qu'elles ne recréent un objet existant pour pouvoir l'étudier plus commodément, ce qui constitue la nature et la raison d'être du laboratoire dans les sciences plus avancées. On rencontre donc A nouveau la confusion entre les faits de laboratoire et les faits tels qu'ils existent dans la vie quotidienne, c'est-A-dire la réduction des seconds aux premiers.

Le décodage, pour sa part, n'apparaît comme l'autre composante de cette simple équation que par une pétition de principe pareillement récusable. En effet, si les correspondances grapho-phonétiques sont assurément une des composantes de la lecture, il n'est pas certain par contre que la pratique méthodique du décodage qui la met en oeuvre le plus souvent A l'école soit un impératif catégorique de l'apprentissage de la lecture. En fait, non seulement les pratiques possibles d'enseignement du code sont bien plus diversifiées que le décodage systématique et exhaustif décrit dans l'ouvrage ne le suppose (écriture, décodage partiel combiné au contexte...), mais de plus ces correspondances ne sont que l'un des nombreux indices dont tout apprenti lecteur sait faire usage.

Il est bien d'autres points qui mériteraient d'être discutés, mais pour ne pas nous étendre excessivement, nous nous contenterons d'en évoquer quelques-uns. Ainsi, par exemple, de la conception des difficultés d'apprentissage de la lecture (p. 156), dont la présentation A l'aide de la seule équation rapportée ci-dessus apparaît étroitement mécaniste, d'autres facteurs explicatifs n'étant qu'évoqués au passage (p.153, p.172). L'approche très médicalisante de ces difficultés, largement développée dans le chapitre cinq, ramène sur le devant de la scène l'archaïque notion de "dyslexie", dont le texte reconnaît toutefois qu'elle ne concerne «sans
doute même pas 5% de la population» (p.174), mais dont, curieusement, les questions de définition et de catégorisation occuperont l'essentiel du chapitre, laissant le lecteur sur sa faim en ce qui concerne les 95% de mauvais lecteurs considérés par les auteurs comme non "dyslexiques".

Il serait intéressant de voir également comment la vieille théorie du handicap socioculturel refait discrètement surface (pp. 136, 166-167, 192-193, 213), en dépit des vigoureuses critiques qui lui ont été portées il y a vingt ans (CRESAS, 1978), retour A la surface invitant A se demander si cette théorie n'est pas avant tout l'expression d'une sorte de sociologie spontanée des classes moyennes se penchant sur les difficultés scolaires des enfants de milieux sociaux défavorisés, et ignorant les théories sociologiques des difficultés scolaires plus décentrées de l'habitus de classe de ceux qui les professent.

Plus largement, il faudrait aussi s'interroger sur la représentation des maîtres qui figure dans cet ouvrage. Ceux-ci, compte tenu de la diversité des "systèmes de référence" qui leur sont proposés, sont jugés ne pas pouvoir «dégager une hiérarchie des exigences qui devrait structurer le travail des élèves» (p.l13). «Beaucoup d'entre eux», par ailleurs, sont déclarés avoir une connaissance «très faible» de la psychologie et de la linguistique (p.10), «tendance A se replier sur eux-mêmes» (p.136) et faire preuve «bien souvent d'un manque de vigilance technique A l'égard des difficultés rencontrées par l'écolier» (p. 141). Sans vouloir discuter tel ou tel de ces points - certaines études effectuées par la DEP le permettraient pourtant - nous nous contenterons de relever le caractère systématiquement négatif des références faites aux maîtres dans cet ouvrage.

Il faudrait pareillement s'interroger sur sa représentation de l'enfant (pp. l13-l14, 128, 132), celle-ci conduisant A préconiser des écrits simplifiés et des «objectifs mieux adaptés aux compétences exigibles d'enfants de sept ans», propositions explicitement en retrait desprogrammes officiels, et qui vont parfaitement A contre courant de toute l'évolution contemporaine relative A l'éducation des enfants.
 

DE QUEL TYPE DE LIVRE S'AGIT-IL ?

Un livre scientifique ?
La question que se pose légitimement tout lecteur potentiel face A un tel ouvrage est de savoir de quel type d'ouvrage il s'agit. C'est A répondre A cette question que nous nous attacherons maintenant. L'avant-propos, l'introduction, et maintes mentions ultérieures invitent le lecteur A considérer ce texte d'abord comme un texte scientifique, plus précisément comme un texte faisant le point des savoirs concernant l'apprentissage de la lecture.

On pourrait effectivement le classer dans ce registre, compte tenu du souci dont il témoigne d'apporter au lecteur une perspective théorique sur cette question et d'appuyer celle-ci sur des recherches empiriques. On pourrait même qualifier son attitude de "scientiste". En effet, la seule connaissance considérée comme recevable par les auteurs est celle qui provient de "la littérature", c'est-A-dire d'articles de revues, de préférence récents et rédigés en anglais. La connaissance empirique de la lecture, c'est-A-dire celle qui a été construite dans l'expérience des classes, n'entre pas en ligne de compte, fût-ce sous forme d'hypothèses A étudier. Pour les auteurs, toute la connaissance est dans les revues et tout ce qui n'y est pas n'est pas une  connaissance. On reconnaît lA l'attitude pugnace des sciences humaines et sociales qui, ayant A faire la preuve de leur légitimité dans le champ universitaire, ont choisi de "faire science" pour  impressionner collègues et décideurs venus des "humanités" et se faire reconnaître comme étant de la même famille par ceux venus des sciences de la nature. On peut s'attendre toutefois A ce que, dans le monde de l'éducation, une fois passée la phase initiale d'étonnement mêlé de respect devant ce discours scientiste, celui-ci ne parvienne pas A convaincre des professionnels dont, pour s'affirmer, il est d'emblée amené A affirmer l'ignorance, professionnels aux yeux desquels par ailleurs l'efficacité importe plus que la scientificité.

Si ce texte peut donc A certains égards être considéré comme scientifique, voire comme "hyper-scientifique", ce qui amène toutefois A s'interroger sur sa véritable nature c'est les transgressions qu'il s'autorise vis-A-vis de quelques-unes des règles fondamentales de l'écriture
scientifique. L'une d'entre elles, dans un état de question, consiste A présenter les différentes thèses en présence, les faits qui les soutiennent et, sur cette base, A établir des conclusions, modestement provisoires. Or, nous avons vu, sur deux exemples, ceux de la conscience phonique et du contexte, que les théories autres que celles qui ont la faveur des auteurs sont ignorées et les faits correspondants ne sont pas présentés. Dans le discours scientifique, une seconde règle, tout aussi impérative, consiste A nommer les auteurs et A référencer leurs textes, de telle sorte que le lecteur ait la possibilité de vérifier si ce qui en est dit correspond bien A
ce qui a été écrit. Le lecteur de ce livre devra pourtant attendre d'arriver au tiers environ de sa lecture (p.87) pour voir enfin nommée "l'approche idéovisuelle" dont, A longueur de page pourtant, de multiples allusions avaient fait le procès. Procès larvé, sans noms et sans références. Des auteurs incriminés, un seul figurera explicitement dans tout l'ouvrage (Franck Smith, p.90). Le lecteur n'aura donc pas la possibilité de voir nommée l'autre cible anglophone majeure qu'est Goodman et, plus regrettable encore pour le lecteur francophone, des auteurs comme Charmeux et Foucambert, dont les fantômes hantent pourtant de nombreuses pages de ce livre. Ajoutons enfin, troisième règle, qu'il n'est pas dans l'habitude des chercheurs de s'exprimer de façon normative et sur un ton définitif. Des formules telles que «Cette conception est fausse» (p.45), «caractère incontournable» et «Caractéristique incontournable» (p.48), «Cette conception est dépassée. Heureusement, car elle est erronée» (p.66), «C'est faux» (p.85), «cette conception est dépassée» (p.88), «étape incontournable» (p.93) ne font pas partie du langage de la recherche, si l'on veut bien admettre que le chercheur n'est pas celui qui connaît la vérité, mais celui qui la cherche. Ce n'est pas sans raison que l'on ne parle plus aujourd'hui de "savant" mais de "chercheur". Compte tenu de cet ensemble de remarques, cet ouvrage ne nous paraît donc pas pouvoir être considéré purement et simplement comme un ouvrage scientifique.

Un livre de vulgarisation scientifique ?
Peut-on alors considérer que, A défaut d'être véritablement scientifique, il s'agit d'un livre de vulgarisation scientifique, d'une sorte de "La lecture pour les nuls" ? Son écriture facile, ce qui est une qualité A nos yeux, plaide en ce sens. Si le parti pris d'une bonne lisibilité ne s'accompagnait pas d'une prise de parti systématique, cette caractérisation pourrait être retenue, mais si vulgarisation il y a, c'est moins celle des connaissances actuelles dans leur pluralité, leurs contradictions et leurs doutes que celle d'une conception théorique particulière. Son vrai titre  pourrait alors être quelque chose comme "Défense et illustration de la
conception phonique de la lecture et de l'écriture A l'intention des maîtres d'école". L'introduction A cet ouvrage est particulièrement éclairante A cet égard. Ce qui plaiderait aussi pour un tel classement ce sont ses approximations dans l'information, dont on ne saurait tirer rigueur dans un livre de vulgarisation, alors qu'elles seraient inexcusables dans un vrai livre scientifique. Ainsi, par exemple, les conclusions des chercheurs qui ont étudié la lecture d'histoires A haute voix A la maison chez des enfants d'âge préscolaire, et qu'ils nous ont invité récemment A discuter (ISSBD, Berne,1998), sont beaucoup plus prudentes et nuancées que celles qui sont présentées dans cet ouvrage (pp.134-136, 138-139). En particulier, les personnes qui ont mené ces recherches ne manquent jamais de rappeler qu'ils proposent des corrélations, A partir desquelles ils ne s'autorisent pas d'imputation causale. Dire, de surcroît, que cette pratique familiale a un «effet considérable» (p.136) ne correspond pas avec les conclusions d'une revue de questions de trente années de recherches portant sur ce thème et qui conclut que «la grandeur des effets observés est tout A fait variable au sein d'un échantillon et d'un échantillon A l'autre et est modeste, en moyenne, contrairement aux attentes.» (Scarborough et Dobrich, 1994, p.245). Les auteurs d'une autre métaanalyse plus récente et quantitative, pourtant généralement mieux disposés vis-A-vis de ce type de pratique, énoncent cependant que «Au point où nous en sommes, nous ne pouvons conclure qu'il faut encourager sans conditions les parents de jeunes enfants d'âge préscolaire» (Bus, Ijzendoom & Pellegrini, 1995, p.17). Ainsi donc, si l'ouvrage que nous analysons peut être considéré comme un livre de vulgarisation, ce ne peut être que dans les limites d'une information qui, A une lecture attentive, apparaît A la fois partiale et partielle.

Un livre pédagogique ?
Dans la présentation qui en est faite, cet ouvrage se veut non seulement scientifique mais aussi pédagogique. Il importe donc maintenant de voir dans quelle mesure il peut être considéré comme tel. Plus précisément, suivant l'avant-propos, ce texte «fait état des pratiques d'intervention, d'enseignement, de remédiation, de leur efficacité et de leurs faiblesses» (p.8) et formule des «conclusions et recommandations» (p.9). Nous examinerons tour A tour chacun de ces deux points.

En ce qui concerne les pratiques pédagogiques, ce qui en est dit est tout d'abord du non dit. C'est ainsi, pour nous en tenir A l'introduction, et sans prétendre être exhaustif, qu'il est fait référence A «une conception de l'apprentissage de la lecture que l'on pourrait qualifier de "romantique"» et qui «est aussi peu fondée scientifiquement que pédagogiquement» (p,18), A une comparaison entre cet apprentissage et celui du vélo ou de la natation (p,18), A un «jeu de devinettes» (p.21), affirmé que la découverte de l'identité d'un mot ne peut se faire «spontanément», qu'il convient d'aider l'enfant «par enseignement explicite» (p.23), et que certains tentent «de concilier l'inconciliable» (p.25). Seuls les lecteurs avertis sauront rendre A César ce qui revient A César. Le fait de ne pas partager nécessairement les positions théoriques évoquées sinon caricaturées dans ces pages, prises A titre d'exemples parmi beaucoup d'autres, nous permet de dire que quand il est «fait état» (p.8) de la sorte des pratiques pédagogiques, cette manière de procéder, allusive et malveillante, ne fait pas avancer le débat pédagogique.

Ce n'est heureusement pas uniquement de cette façon implicite que la didactique est présentée dans ce livre. Ce qui est explicitement dit des pratiques actuelles laisse pourtant un sentiment de malaise car on cherche vainement la base empirique des idées énoncées. Bien que les recherches décrivant et analysant les pratiques didactiques en matière de lecture et d'écriture soient moins nombreuses que celles consacrées A l'apprentissage de la lecture, elles n'en existent pas moins, et pourtant tout se passe comme si l'enseignement de la lecture ne constituait pas un objet de recherche empirique, au même titre que son apprentissage, mais était condamné A demeurer "une affaire d'opinion", contrairement au voeu contraire exprimé par le président de l'ONL (p. 11). Il est donc A la fois regrettable de ne pas voir indiquées ces recherches et de voir la place qui aurait pu leur être consacrée l'avoir été A l'énoncé des opinions des rédacteurs.

Le lecteur intéressé par la didactique de la langue maternelle aura pourtant la possibilité de prendre connaissance de quelques recherches, pour la plupart effectuées aux Etats Unis (p.128 sqq, p.146 sqq, etc.), mais, ne se voyant A peu près rien dire de ce qui se passe en France ou dans les pays francophones, pourra en déduire qu'il ne s'y passe rien. Il lui suffirait pourtant, de consulter par exemple la Revue Française de Pédagogie, ou la revue Repères, ou encore une base de données de l'INRP, telle que celle produite dans le contexte des ZEP par le Centre Alain Savary, pour qu'il se sente rapidement débordé par la masse des expériences ayant fait l'objet d'une rédaction, mais en français il est vrai, et souvent avec une méthodologie qui, compte tenu des faibles moyens dont dispose A ce jour la recherche française en éducation, n'est pas aussi sophistiquée que celle en honneur dans des pays anglophones plus convaincus que la pédagogie n'est pas un don ou le fruit de l'expérience mais un objet de recherche scientifique.

Quant aux recherches didactiques américaines fréquemment évoquées, s'il est apparu plus haut que les auteurs ne connaissent guère les recherches en didactique du français des pays francophones, il apparaît en outre qu'ils n'ont de la didactique des pays anglophones qu'une connaissance fort imprécise. C'est ainsi que la définition qu'ils produisent de "l'approche idéo-visuelle (whole-word, dans les pays anglo-saxons)" (p.87) est en fait un mélange inextricable de trois choses différentes : la pédagogie proposée par l'AFL, la didactique Whole-word et le mouvement Whole Language. En substance, la didactique Whole-word renvoie A un apprentissage global de mots, tandis que le mouvement Whole Language préconise de confronter l'enfant au "langage entier" plutôt que de privilégier un aspect particulier tel que la phonologie, ce qui conduit notamment, sur le plan de la lecture, A faire un large usage de la littérature de jeunesse et, sur celui de l'écriture, A placer les enfants en situation d'écriture inventée. Le lecteur curieux d'approfondir ces démarches américaines pourra se reporter au Literacy Dictionary publié récemment par l'International Reading Association (1995). De la même façon, le passage où il est dit que «Aux Etats-Unis, un programme de "Reading Recovery" a été lancé» (p.144), en le mettant sur le même plan que le dispositif français des ZEP, procède d'une autre confusion. En fait, Reading Recovery est une méthode de rééducation et non pas un programme type ZEP. De plus, ce n'est pas une méthode américaine, mais une méthode créée en Nouvelle Zélande qui, il est vrai, a été importée aux Etats-Unis et y connaît un vif succès. Enfin, ironie du sort, elle a été mise au point par Marie Clay dont les options pédagogiques sont aux antipodes de celles qui ont la faveur des rédacteurs de ce livre (voir Literacy Dictionary, 1995).

En ce qui concerne maintenant les "conclusions et recommandations" d'ordre didactique, l'idée maîtresse est l'enseignement du décodage. Les auteurs précisent que «l'entraînement A l'analyse phonémique et l'apprentissage d'associations lettre-phonème jouent un rôle complémentaire : ce sont les deux branches du principe alphabétique.» (p.74) et que l'acquisition de ces deux compétences demande «explicitation et prise de conscience» (p.75). Ils. insistent par ailleurs sur l'importance des premières semaines d'enseignement (p.73, p.75) ainsi que sur «l'importance d'une pratique intense de la lecture» (p.89). Pour la suite de l'apprentissage, une idée majeure est qu’«Il faut qu'il y ait adéquation entre la nature, la longueur et la complexité des textes, d'une part, et le type d'objectifs poursuivis par l'enseignant, d'autre part.» (p.132). Le lecteur intéressé trouvera ces propositions énoncées de manière synthétique A la fin des deux chapitres consacrés spécifiquement A l'apprentissage (chapitres 2 et 3), sous une rubrique Conclusions et recommandations, qui semble avoir été ajoutée tardivement puisqu'elle n'apparaît pas dans la table des matières.

Il ne nous paraît pas utile de reprendre point par point ces propositions, A juste titre souvent très concrètes, car celles-ci ne diffèrent guère de la didactique de l'écrit telle qu'elle figure dans les manuels les plus répandus dans les classes, comme l'attestent les palmarès des chiffres de vente des éditeurs pédagogiques, et telle qu'elle est mise en oeuvre par la plus grande partie des maîtres, ainsi que l'indiquent les enquêtes relatives aux pratiques pédagogiques. Ainsi, par exemple, l'un des deux schémas figurant dans le livre (p.l10), ce qui indique sans doute l'intérêt que les rédacteurs lui confèrent, présente une série d'étiquettes A remettre en ordre pour reconstituer une histoire. Sachant que ce type d'activité est pratiqué régulièrement par A peu près tous les maîtres dans toutes les classes du cycle 2, le lecteur, surpris, est amené A se demander ce qui l'emporte dans ce livre de la naïveté ou de la méconnaissance de ce qui se passe réellement dans les classes.

Ajoutons toutefois que, A côté de ces indications qui émanent d'une conception très classique de la didactique de l'écrit, il en est d'autres qui relèvent d'une conception plus nouvelle, par exemple celles qui demandent de faire plus de place A l'écriture ou A la littérature de jeunesse (pp.121-125, pp.129-131), ou recommandent des moments de lecture silencieuse (p.120, p.143), mais il faudrait alors examiner de quelles restrictions s'accompagnent ces concessions A des pratiques condamnées par ailleurs. En bref, A la lecture de ce livre, le lecteur convaincu des mérites de la didactique dominante sera conforté dans ses positions alors que l'enseignant désireux de renouveler ses pratiques pour les rendre plus efficaces demeurera sur sa faim.

Passant outre les propositions qui viennent renforcer ce qui se fait majoritairement dans les classes, ce qui rend le lecteur attentif aux publications de l'ONL encore plus perplexe c'est le vigoureux changement de cap qu'il relève entre l'orientation proposée dans le texte analysé ici et celle proposée deux ans auparavant dans un autre document émanant du même organisme (ONL, 1996). Dans cette publication antérieure, un des directeurs du texte actuel, Guy Robillart, se faisant le rapporteur d'un rapport de l'IGEN (1995) sur l'apprentissage de la
lecture A l'école primaire, s'exprimait ainsi : «En revanche, dans les classes qui obtiennent les moins bons résultats, on privilégie clairement le code par rapport au sens ou l'inverse» (Robillard, 1996, p.145) ; de même, A la page suivante, on pouvait lire : "Il est clair, en revanche, que dans les classes où l'on ne mène pas de front apprentissage du code graphophonologique et accès au sens des mots d'un texte, il y a risque d'échec pour nombre d'enfants" (id., 146) ; dans le résumé de ce même article, on retrouvait encore la même idée, mais exprimée différemment : «Les maîtres qui obtiennent les meilleurs résultats sont ceux qui abordent parallèlement l'apprentissage du code et la compréhension du texte au niveau de la lecture mais également au niveau de l'écriture» (ibid., 153).

Une autre caractéristique frappante de cet ouvrage est le ton sur lequel les énoncés d'ordre pédagogique sont produits, quand ils se rapportent au maître ou A l'élève. Les formules employant le verbe devoir, du type «le maître doit» (p.82) ou «Le développement de la conscience syntaxique ne doit en aucun cas» (p.105) sont légion (au moins vingt). Leur font écho les «il faut» (p.70, p.132, p.167), «il importe» (p.122), «il est important» (p.93), «ne doit en aucun cas» (p.105), etc. Ce ton est parfois celui des IO, et donc simplement indicatif ou prescriptif, notamment quand il utilise le futur – «l'enseignant veillera aussi» (p.94) -, mais quand il se fait impératif – «un principe de progression, allant des unités phonologiques les plus simples aux plus complexes devra être suivi» (p.93), il témoigne alors d'une posture d'autorité qui étonne dans un ouvrage émanant d'un organisme qui n'est censé produire que des «propositions» (p.219), mais qui ne saurait étonner quand on a pris la mesure de l'absolue conviction qu'ont les auteurs de la valeur de leurs idées. Vu sous cet angle, l'ouvrage apparaît donc comme un texte pédagogique de type administratif, sans en avoir toutefois le statut, accroissant d'autant la perplexité du lecteur quant A sa nature exacte.

Un livre politique
Un dernier point, mais sans doute le plus grave de tous, se situe dans un registre plus politique que pédagogique. Il concerne la liberté pédagogique des maîtres. Ainsi le lecteur stupéfait peut-il lire : «En cette matière, l'Observatoire n'appellera pas A la liberté pédagogique de l'enseignant» (p.86). Plus loin, il se verra préciser que «A l'heure actuelle, nous pouvons affirmer que la conception de l'enseignement de la lecture la plus appropriée A ce que nous savons de l'apprentissage de la lecture est celle qui insiste sur la découverte, de manière précoce, du principe alphabétique» (pp.91-92). En d'autres termes, puisqu'il s'agit bien ici d'enseignement et non plus seulement d'apprentissage, il faut entendre que la "conception phonique", définie quelques pages plus haut (p.87) est celle qui doit être imposée puisque, est-il expliqué (p.86), les acteurs de l'éducation n'ont pas la compétence nécessaire pour pouvoir opérer les choix pédagogiques qui conviennent, compétence qui est celle de l'Observatoire, seul détenteur semble-t-il de «la vérité scientifique» (p.86).,

A notre connaissance, cette liberté pédagogique a toujours été considérée comme inaliénable dans la République Française, les IO ayant pour fonction de dire "quoi" enseigner, c'est-A-dire quels objectifs pour quels niveaux, et non "comment" le faire. C'est précisément Guy Robillart, un des directeurs de l'ouvrage analysé, qui rappelait ce fait dans l'article cité plus haut : «Les maîtres, et notamment ceux qui exercent au cours préparatoire, ont toujours eu A assumer initiative et responsabilité. Cette responsabilité des maîtres est soulignée en ces termes dans les programmes de 1995 : "Toute méthode peut être utilisée A condition que son efficacité soit démontrée et qu'elle réponde aux besoins et aux possibilités des élèves. Il est de la responsabilité de chaque enseignant de déterminer les pratiques et les démarches pédagogiques les plus appropriées."»(Robillard, 1996, p.141).

Il est vrai toutefois que cette règle n'est pas universelle. Ainsi, la liberté pédagogique est-elle réduite en Grèce, où un manuel obligatoire canalise la pratique des maîtres, et au Texas, où l'enseignement de la lecture doit respecter la conception officielle de l'Etat du Texas. On le voit, A nouveau, la tentation est forte, quand on est convaincu de posséder la vérité, d'imposer ses vues aux autres. Le contrepoids A cette tentation réside, chez le chercheur, dans la conviction, et non dans la seule affirmation, que la vérité scientifique est «provisoire» (p.86). Chez le pédagogue, elle repose sur l'idée que la liberté du maître est la meilleure garantie de l'adaptation de son enseignement A l'hétérogénéité des élèves. Chez le citoyen, elle réside dans une conviction plus forte que toute autre que la liberté n'est pas seulement un des éléments de la devise républicaine mais une valeur A défendre dans toutes les circonstances. Le débat, on le voit, débordant les sphères scientifique et pédagogique, pour devenir strictement politique, nous n'irons pas plus loin sur cette voie.

Un livre polémique
Si l'ouvrage de l'ONL apparaît difficile A considérer comme un ouvrage scientifique, de vulgarisation scientifique, ou de pédagogie, c'est non seulement parce qu'il ne relève pleinement ni de l'une ni de l'autre de ces catégories, mais plutôt d'une troisième, celle du pamphlet. Cet ouvrage apparaît en effet comme résultant, au départ, de la conjonction d'une double irritation : celle de chercheurs acceptant mal que leur expertise ne soit pas encore reconnue par les professionnels de l'éducation et celle de responsables de haut niveau de l'Education nationale ayant le sentiment que leur autorité n'est plus reconnue par ces mêmes professionnels. Et ce point de départ imprime tout au long sa marque sur des analyses qui se voudraient scientifiques ou pédagogiques mais qui ne parviennent pas A masquer que ce livre est fondamentalement un livre polémique, écrit en réaction contre les idées professées au cours des vingt A trente dernières années par ceux qui ont voulu renouveler les pratiques de l'enseignement de la langue écrite, en France et ailleurs. Posé en terme de pouvoir, ce livre est A inscrire dans un contexte où s'affrontent innovateurs d'une part et, de l'autre, chercheurs en laboratoire coupés du terrain et décideurs. Sous cet angle, il est le fruit de l'alliance des deux derniers contre les premiers. Sans doute eut-il été préférable alors, pour la clarté de l'exposé, que des chapitres différents, répondant A ces catégories différentes de discours, aient été rédigés par des auteurs différents, l'unité de signature dans l'ouvrage présenté parvenant mal A masquer la polyphonie de son propos et la polygraphie de sa rédaction.
 

CONCLUSION

En guise de conclusion, nous essaierons d'indiquer quelques unes des limites de ce livre. La position adoptée par les auteurs, fidèles en cela A une tradition solidement établie, pose le problème de l'apprentissage de la lecture en termes de langue, c'est-A-dire met l'accent sur ce qui, dans le triangle didactique, correspond A l'objet. Cette position, aussi nécessaire soit elle, ne nous apparaît pas suffisante car l'apprentissage de la lecture met en présence non seulement un objet, la langue, mais aussi un sujet, l'enfant, dans des situations d'enseignement. Ce sujet, dont les travaux de Ferreiro (Ferreiro et Gomez-Palacio, 1988) ont rappelé A tous l'existence, est tout autre chose que la boite noire dans laquelle, conformément A la tradition néobehavioriste, il suffirait de mettre ce qui convient en entrée pour que la sortie soit conforme aux attentes. A cette position réductrice, on peut préférer celle suivant laquelle, selon une perspective constructiviste peu présente dans ce texte, l'enfant est l'acteur de son apprentissage dans la mesure où il construit des hypothèses, les teste, conceptualise l'écrit, élabore des stratégies... ou résiste A l'enseignement qui lui proposé, voire le refuse.

Le second aspect qui nous paraît largement sous estimé dans ce texte est celui du rôle de la didactique, c'est-A-dire des situations d'enseignement. Très souvent, en effet, les comportements des enfants rapportés apparaissent, aux yeux du lecteur sensible A cet aspect, dépendre bien plus de facteurs didactiques que de facteurs cérébraux tels que ceux énoncés dans le dernier chapitre. Dans cette perspective, parler de "l'apprentissage de la lecture", comme si celui-ci s'effectuait de la même façon quel que soit le contexte pédagogique, est une position dont des recherches en cours de publication montreront sous peu les limites. A la façon dont cet ouvrage pose le problème de l'apprentissage de la lecture correspond la démarche applicationniste sur le principe de laquelle repose sa structure. Pourtant, procéder de ce que l'on croit savoir de l'apprentissage pour en déduire ce qui devrait être fait en matière d'enseignement pose un double problème. D'une part, s'il est vrai, comme on peut légitimement le penser dans une perspective vygotskyenne (Vygotsky, 1985), que c'est l'enseignement qui détermine l'apprentissage et non pas l'inverse, la démarche qui commande ce livre consiste alors A mettre la charrue avant les boeufs. D'autre part, les développements contemporains de la didactique ont montré - ce  contre quoi Piaget il y a trente ans déjA mettait en garde (Piaget, 1969) - la nécessité de ne pas confondre une inférence pédagogique, faite par un psychologue notamment, et une vérification pédagogique, faite par un didacticien. En d'autres termes, une inférence d'ordre didactique découlant d'une recherche psycholinguistique classique n'est qu'une hypothèse dépourvue de toute validité tant qu'elle n'a pas été validée par une expérimentation sur le terrain scolaire. L'école, du point de vue de la didactique, n'est pas un terrain d'application d'idées de psychologues ou de linguistes, et moins encore une terre de mission, mais un lieu dans lequel il revient A la recherche didactique de transformer les inférences en hypothèses, de tester ces hypothèses et, sur la base des résultats obtenus, de décider si elles peuvent être considérées comme valides sur le plan didactique, la question de leur utilisation relevant de la responsabilité des acteurs, mais dans un autre temps et en toute liberté.

Le point de départ polémique dont ce livre porte la marque a pour conséquence d'enfermer sa réflexion dans une logique binaire, du type "les innovations didactiques" (mauvaises) et "les connaissances scientifiques" (bonnes). Dans la réalité concrète de l'école, comme les études effectuées tant dans le monde anglophone que francophone l'ont montré, il existe très peu de classes où le sens règne en maître et très peu de classes régies massivement par le code, mais un très grand nombre de classes où la didactique se présente comme une combinaison A des doses extrêmement diverses de ces deux types de variables, avec toutefois une dominante claire de type code. Raisonner donc en termes binaires, c'est s'enfermer dans une perspective abstraite, au plus mauvais sens du terme.
Si l'on se place dans la perspective du rapport de l'IGEN sur les CP (1995), il n'y a pas deux didactiques de la lecture mais bien trois, et cette troisième, en fait, prend des formes tellement variables qu'il serait préférable que les chercheurs s'attellent A leur étude et A celle de ses effets sur les apprentissages qui en résultent plutôt que d'enfermer le débat dans une dichotomie stérile. Ce n'est hélas pas dans cette perpective que le livre de l'ONL a été conçu. C'est pourquoi, loin de permettre d'aller plus loin, il ne pourra guère selon nous que légitimer les uns et irriter les  autres, c'est-A-dire conduire A perpétuer la "guerre de la lecture". En somme, un coup pour rien.
 
 
 

Références bibliographiques

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ISSBD (International Society for the Study of Behavioral Development) - XVth Biennal ISSBD Meetings, Bern, July 1-4, 1998 ; Symposium : The social ecology of emergent literacy : learning in home and school contexts. Co-conveners : T.Blicharski and A.Pellegrini; Presenters : M. Sénéchal and J.O.Lefevre ; A.G. Bus ; N.Pigem, T.Blicharski & F.F. Strayer ; Discussant : J.Fijalkow

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PIAGET J. (1969) - Psychologie et Pédagogie, Paris, Denoël

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Jacques Fijalkow